The Brian Jonestown Massacre – Revelation

Quelle est cette révélation faite à Anton Newcombe, patron incontesté de The Brian Jonestown Massacre ? Que la vie de famille calme la colère ? Que Berlin est une ville faite pour un Californien ? Que disposer d’un nouveau studio d’enregistrement est une bénédiction ? Longtemps, Newcombe s’apparenta à un hybride entre Captain Beefheart et Mark E. Smith, tyrannisant un groupe de musiciens embauchés et débauchés à la vitesse du gros son. Le chemin vers plus d’harmonie, à commencer par des rapports moins psychotiques avec son entourage musical, a été entamé sur le précédent LP, Aufheben (2012). Il se poursuit aujourd’hui, et on aime tout autant cette version apaisée du personnage. Certes, on peut s’interroger sur Second Sighting, ballade instrumentale pastorale que surplombe une flûte traversière édénique. Mais en l’écoutant mieux, les guitares acoustiques s’entrecroisent de manière drôlement intéressante et intrigante. Le diable est dans les détails, on le sait bien. Dès l’ouverture, Newcombe installe une tonalité plus solaire qu’à l’accoutumée avec Vad Hände Med Dem?. Batterie frontale, trois accords entraînants et brillants, mais aussi bruits “glougloutants” qui imitent les cruches électriques utilisées par 13th Floor Elevators et texte en suédois signé Joakim Åhlund (Les Big Byrd). Plus loin, Food For Clouds dégage également une puissante aura d’optimisme.

Mais tout n’est pas béat. Sur What You Isn’t, entre Spacemen 3 et Bob Dylan, une ligne cuivrée à l’ampleur funèbre (jouée au clavier) imprime la ligne mélodique et mélancolique. On retrouve ce type de sons très particuliers ailleurs, sur Fist Full Of Bees par exemple, qui relègue les guitares au troisième plan. Comme ses trois prédécesseurs – My Bloody Underground (2007), Who Killed Sgt. Pepper? (2010) et Aufheben –, ce quatorzième album bénéficie d’une production moins brouillonne que par le passé mais l’auteur ne peut s’empêcher de compacter le son et de nourrir souvent les sous-couches avec des larsens et autres perturbations. Contre-exemple, Unknown affiche la sobriété d’une chanson acoustique de Syd Barrett, l’étrangeté résidant dans la réverb’ de la voix. Les autres obsessions musicales d’Anton Newcombe sont bien présentes : l’instrumental Duck And Cover est un excellent concentré de shoegaze revisité et l’obsédant rythme motorik de Memorymix évoque autant Can que Suicide. Bien sûr, l’élément Brian Jones du blase n’a pas seulement été choisi pour le tragique destin du premier leader des Stones. Days, Weeks And Moths détourne en douceur une structure de blues et le final Goodbye (Butterfly) adopte consciemment ou non les gimmicks de Sympathy For The Devil. Mais comme dans tous ses meilleurs disques, The Brian Jonestown Massacre vaut bien mieux que la simple énonciation de ces références. Et pendant que le synthé cuivré et la flûte font une ultime et discrète apparition, on finit d’être convaincu que Revelation n’est pas un massacre, mais bien une tuerie.

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