Avec ces paroles pleines de sens lâchées comme autant de météorites par l’auguste voix de Laetitia Sadier, on aurait peine à croire que quelque chose brille encore dans notre bas monde. La société, sa cruauté, ses mensonges, ses injustices, la chanteuse en a toujours nourri son verbe. Et l’entendre énoncer calmement en épilogue de son nouvel album que, “avant de mourir d’une catastrophe nucléaire, nous sommes condamnés à mourir de honte d’avoir accepté le monde tel qu’il va”, aurait de quoi laisser un goût amer. Sauf que ces mots sont enveloppés dans un écrin lumineux fait de chœurs angéliques, celui du morceau splendide intitulé sans fard Life Is Winning. Il ne s’agit donc pas de se lamenter, mais bien de garder ses yeux ouverts pour continuer de cheminer vers le futur. Face à la morosité et l’érosion des rêves, Laetitia Sadier oppose autant une inébranlable légèreté qu’un pragmatisme décidé.
Cette saine détermination transforme chacune de ses apparitions en précieux élixir. Troisième acte d’une discographie solo discrète mais épanouie, Something Shines est le recueil le plus homogène et le plus maîtrisé de la voix de Stereolab, porté par un groupe bienveillant au son chaud et rond. On la retrouve, refaisant l’histoire du monde sur le mutant Quantum Soup ou relisant du Bourdieu sur des accords lunaires. De vapeurs soul luxuriantes (Release From The Centre Of Your Heart) en irrésistibles mélopées sensibles (Then I Will Love You Again), Laetitia Sadier célèbre l’existence et la résistance comme elle seule semble savoir le faire, toujours avec le goût du risque et de l’inconnu. “Changer le monde, changer la vie”, chantait-elle en 1991 à l’éclosion de Stereolab. Le message est toujours le même.
> Laetitia Sadier joue à l’Olympic Café (Paris) ce dimanche 30 novembre, des places à gagner.