Décidément, même si c’est un peu devenu la tarte à la crème de l’affirmer encore tant le constat a été fait, de nos jours dans le paysage de la pop et de la chanson en français, on se sent comme d’heureux manieurs de battées en pleine ruée vers l’or.
Tenez, pas plus tard qu’hier, alors que bibi était déjà bien content de mettre en ligne le nouveau clip de Julien Barbagallo en solo, on est tombé sur les mots (voir ci-dessous) que le musicien a rédigés pour louer un autre artiste qui a joué du trombone sur l’album À L’Amitié (2014) d’Aquaserge (groupe dont Julien est le batteur).
Cet autre artiste, c’est Thomas Boudineau, alias Flegmatic, que l’on a croisé depuis plusieurs années sans vraiment le savoir en tant que multi-instrumentiste de Angil And The Hiddentracks. Depuis deux ans environ, il postait sur Soundcloud des morceaux de sa facture ou une reprise de Sebadoh, le tout repris sur des compiles du site À Découvrir Absolument.
Finalement, Flegmatic vient de rassembler assez de chansons en français pour former la collection Esprit De Conquête, que nous présente aujourd’hui une équipe bien connue de chercheurs d’or chanté : La Souterraine.
‘C’est un peu décousu, du coup. J’aime bien.” C’est Thomas qui écrit ça dans un texte (présenté là-dessous aussi) où il relate les conditions dans lesquelles ont été imaginées ses chansons. Une prose dont le ton et les détails donnés reflètent très bien la musique qu’elle accompagne. Affleurent un réalisme implacable mêlé de poésie qui console, une tendance au sarcasme désopilante en contrepoint d’une tendre candeur, des accès d’espoir nés de la dépression ou de l’auto-dépréciation.
“La ville est blanche/La ville est un mur/La ville est un jour qui cogne dur “. Il y a beaucoup de fulgurances de ce genre dans les textes de Flegmatic, des paroles du quotidien souvent autocentrées avec parfois du name-dropping et des intonations chancelantes qui peuvent rappeler – attention certains risquent de s’étouffer ! – Vincent Delerm… Oué oué. Mais en fait ça n’a pas grand-chose à voir, hein, l’orchestration et les arrangements toujours en retenue et pleins de justesse allant d’une formule pop modeste mais irrésistible (Béziers) à des accords épars de guitare acoustique (Rebecca, Tu Es Venue Me Parler) ou des touches de clavier lasses (L’Autoroute, un morceau poignant) ou enjouées (Peter Falk), sans oublier les cuivres et des choeurs féminins taquins qui ajoutent au charme.
Et puis au milieu, il y a l’extrait frappant Anniversaire, dont le rythme et les vers choqueraient presque de prime abord avant que le récit ne se déroule pour finalement dévoiler une anti-love song magnifiquement sinistre et extrêmement bien écrite. Pour couronner le tout, on est d’abord persuadé d’entendre une reprise de Fog période Ether Teeth (2003) quand commence à résonner le piano d’Il Est Partout. Et ça c’est quand même bonnard. À écouter et à lire :