Un neuvième album de Miossec en 2014 ? Qui l’aurait imaginé en 1995 ? Certainement pas l’intéressé, peu à l’aise avec le succès inattendu de son âpre premier essai Boire (1995), qui l’a définitivement installé dans le paysage français. Ce printemps voit Christophe Miossec fêter dignement ses vingt ans de carrière et publier un disque déroutant. Pâle et lumineux, long en bouche plutôt que linéaire. Si le chanteur n’est plus en guerre avec son œuvre, il n’est pas encore apaisé. Miossec évoque ici la genèse d’Ici-Bas, Ici Même, son écriture, des albums de chevet, son rapport à la scène, la découverte de musiques venues d’ailleurs, une Bretagne remuante… {Interview Thibaut Allemand}.
Pour ce neuvième LP, tu as collaboré avec Albin de la Simone, qui en signe les arrangements et la coréalisation. Pourquoi lui ?
J’avais un disque en tête et j’ai essayé de le mettre au point avec beaucoup de personnes. Je voulais de la contrebasse, du marimba, chanter plus doucement. Jean-Baptiste Brunhes et Jean-Christophe Tabuy, mon ingénieur du son en concert, m’ont conseillé Albin. Comme c’est un chanteur, je ne pensais pas que ça marcherait, mais une étincelle s’est produite entre nous. Nous nous sommes retrouvés en dehors du rock – d’ailleurs, l’album n’est pas rock. À partir du moment où l’on met de la contrebasse, ça type un disque (à moins de faire du rockabilly).
Es-tu toujours obsédé par Astral Weeks (1968) de Van Morrison ? Pour l’album mis à la poubelle avant Brûle (2001), tu cherchais ce type de…
(Il coupe.) C’était avec des gens qui a priori étaient d’accord pour se lancer là-dedans, comme Armand Gonzalez. À ce propos, je veux bien qu’Armand se répande en balançant son venin comme il l’a encore fait récemment dans vos pages (ndlr. magic n°171), mais à l’occasion, allez interviewer le batteur de Sloy, Cyril Bilbeaud. Il a reçu les mêmes lettres d’insultes que moi de la part d’Armand, écrites en majuscules au crayon gris, le papier presque déchiré par la haine. Enfin, Armand ne connaissait pas Astral Weeks.
Entendu. Mais est-ce qu’Astral Weeks demeure un idéal que tu poursuis ?
Oui, je crois qu’on entend parfois son influence. J’ai également fait écouter à Albin des disques comme The Lyre Of Orpheus (2004) de Nick Cave & The Bad Seeds, un pur chef-d’œuvre dédaigné par la presse – quand tu vieillis dans le paysage, on ne fait plus trop gaffe à toi, c’est un peu normal. Sinon on a surtout écouté du jazz, de la soul, des chanteuses comme Candi Staton et Patti LaBelle.
Comment s’est déroulé l’enregistrement ?
À part les batteries et les chœurs, j’avais toutes les chansons composées à la guitare. On a tout fait à la maison, tranquille, sans pression ni date-butoir, en indépendance totale et absolue. Lorsque j’ai eu des comptes à rendre, ça s’est mal passé et j’ai enregistré de mauvais disques. Nous étions dans ma cave et dans ma cabane. Passer deux ou trois jours ensemble à faire de la musique, c’est autre chose qu’un dîner au restaurant un mardi soir dans le Vème arrondissement de Paris. (Rires.) Et puis, tu invites deux Picards (ndlr. Jean-Baptiste Brunhes et Albin de la Simone) qui se prennent l’océan de plein fouet. (Sourire.)
Tu dis avoir composé cet album “comme un couillon avec [ta] guitare et trois fois rien au clavier”.
Composer sur deux accords, c’est le plus difficile. Sur onze, aucun problème, mais de là à écrire une bonne chanson… Certains musiciens virtuoses sont incapables de composer un morceau potable sur deux accords. Alors où commence vraiment la musique ? Lou Reed disait que s’il y a plus de deux accords, ce n’est plus du rock’n’roll, mais de la merde. J’adore ces titres fabriqués avec trois fois rien, ils semblent évidents, mais nom de Dieu, il y a du boulot pour que ça tienne debout. Si tu prends les premiers albums de Tom Waits, il y a quinze accords. Vingt ans plus tard, il tourne à deux, trois ou quatre accords maximum. Idem pour Nick Cave.
Et les arrangements ?
Pareil, sur place. Rien n’a été écrit, tout s’est passé à l’oral. Albin n’est pas parti avec les bandes sous le bras, chacun donnait son idée, ça partait à droite à gauche. Ah, et j’avais un marimba, c’était indispensable. Obligation ! (Rires.)
RUMBA
D’ailleurs, on entend des influences hispaniques sur certains morceaux. Les chœurs féminins sur Des Touristes, le tango de Samedi Soir Au Vauban. Tu as souvent confronté la chanson française aux musiques d’ailleurs.
Avant le terme “chanson française”, on parlait de variété. Je me souviens du groupe anglais Weekend monté par d’ex-Young Marble Giants, qui avait intitulé son album La Varieté (1982). C’est un joli mot, et ça veut dire ce que ça veut dire. Sur mon disque, il y a du bandonéon parce que j’aime Astor Piazolla et des claquements de doigts car je pensais à El Camarón De La Isla, un incroyable chanteur de flamenco. En réalité, j’ai dégoté un magnifique gramophone chez un copain brocanteur à Brest. Et en ce moment, je suis à fond dans les 78 tours et la rumba. C’est fabuleux car je suis en méconnaissance totale, je découvre des tas d’orchestres, je fais des recherches sur Internet et il faut souvent s’accrocher pour trouver des traces de certains groupes. Ce sont des parcours de vie étonnants, comme celui d’Antonio Machin, un Cubain exilé à New York puis passé par Paris, Barcelone, Madrid… C’est une petite baignoire de musiques dans laquelle je flotte pendant l’enregistrement. J’aimerais bien faire un disque de rumba un jour – il y en a beaucoup chez Tom Waits, c’est possible de blanchir le truc. Surtout, j’aime bien dire “rumba” et observer la réaction des gens. (Rires.)
Voici quelques années, tu évoquais le souhait de travailler avec Alan Stivell.
Oui, car j’adore la harpe celtique. Mais l’idée serait de ne pas sombrer dans la “biniouserie” bretonne. En fait, j’aimerais travailler avec Alan sans que l’on entende une seule note celtique. J’avais mis de la harpe sur les maquettes de Boire, c’était… Bon, bref.
Pourra-t-on écouter un jour cette fameuse cassette enregistrée avant ton premier LP ?
Elle sortira sans doute quand je serai crevé. (Rires.) PIAS me l’a souvent proposé. Elle a été enregistrée chez mes parents, dans ma chambre de gamin, il y a donc une part d’intime que je veux conserver – on ne doit pas tout dévoiler. Idem pour les autres albums. Lors des rééditions, il n’y a pas eu de démos bonus parce que je ne suis pas le roi de la maquette. J’aurais peut-être dû en faire parfois.
Es-tu toujours aussi sévère avec ta discographie ?
Je ne veux pas être le révisionniste de mon histoire, il faut la laisser filer. J’arrive à cinquante balais et j’ai la prétention de réaliser encore de belles choses. Il faut remettre le métier sur l’ouvrage, faire table rase, bien balayer. Parfois, on balaie mal et on fait n’importe quoi. Tous les gens que j’aime bien ont une discographie inégale, il n’y a pas mort d’homme. Parfois ça me rassure de voir des mecs dont je suis fan sortir des mauvais disques. Quand Neil Young fait une merde ou quand Tom Waits sort un truc pas terrible, je suis rassuré. Après, bien sûr, ils demeurent intouchables.
Tu avais écrit Disparaître sur le dernier effort de Stephan Eicher et vous avez composé ensemble Bête, Comme J’étais Avant.
Oui, je suis descendu le voir en Camargue et nous avons beaucoup discuté. Ces conversations ont eu une influence énorme sur Ici-Bas, Ici Même. Il théorise les choses, s’intéresse à l’économie, à l’art contemporain, à une foule de sujets. Je me souviens l’avoir vu aux Trans Musicales de Rennes en 1984. Il était là avec son 4-pistes et je m’étais pris une claque. Stephan a encore beaucoup à faire et à dire. On se sert les coudes entre vieux.
Les paroles de Répondez Par Oui Ou Par Non sont cosignées par la plasticienne Sophie Calle et l’écrivain Grégoire Bouillier.
C’est un questionnaire de Sophie que l’on a retravaillé mais très peu de mes questions sont restées. Ça fait du bien de s’emparer d’une chanson neutre dans laquelle tu es moins impliqué textuellement.
Sur tes premiers albums, on trouvait des reprises de Johnny Hallyday (La Fille À Qui Je Pense) ou de Joe Dassin (Salut Les Amoureux), mais plus rien ensuite.
Il y a trois ans, Baptiste Trotignon et moi avons adapté The Thrill Is Gone de Chet Baker en français. C’était du sport, mais un putain de plaisir. On avait joué au Printemps de Bourges dans une salle remplie de pros après Chocolate Genius et avant Youn Sun Nah, un truc à se faire décapiter. On s’en était bien sortis – enfin, selon la presse professionnelle. Mais c’est pour ça, je me dis qu’il me reste encore du temps, et beaucoup à faire.
Tu as souvent cité Richard Brautigan, Georges Perros et Henri Calet parmi tes auteurs favoris. Pour Ici-Bas, Ici Même, d’autres écrivains t’ont-ils inspiré ?
Je les ai cités pour ne pas balancer trois tonnes de références. Je préfère grouper le tir, et tant mieux si cela a permis à certains de découvrir Perros. Pour Ici-Bas, Ici Même, j’ai envie d’évoquer Éric Chevillard. Aux Éditions de Minuit, il a publié dix-neuf livres très peu lus mais la sauce a pris lorsqu’il a débuté un blog baptisé L’Autofictif avec pas mal d’aphorismes – c’est un intitulé ironique car il déteste l’autofiction. En fait, Chevillard et moi sommes nés tous les deux en 1964. À la parution de son premier bouquin, Mourir M’Enrhume (1987), nous avions donc tous les deux vingt-trois ans. Je trouvais ça tellement brillantissime que je me suis dit : “OK, ne tentons pas le roman.” (Sourire.) Mais avec Chevillard, on n’est pas dans le cadre de romans, il ne raconte pas de petites histoires qui vont se vendre, il manie la langue et tord la fiction dans tous les sens. C’est un écrivain.
En lisant les romans de Sorj Chalandon, autrefois journaliste à Libération, j’ai parfois pensé à ton écriture.
Ah, Sorj ! Je l’ai croisé à Lyon quand j’étais stagiaire à Libé. Il m’impressionnait car il avait baigné dans la cause irlandaise. Or, la guerre d’Irlande du Nord, Bobby Sands, tout ça, quand on est Breton de Brest, c’était extrêmement important. Quant à ses romans, je ne sais pas, je crois que je préférais Chalandon reporter. Mais je n’ai pas ses galons de capitaine. (Sourire.)
RADOTAGE
Tu évoquais les aphorismes de Chevillard. Ces nouvelles compositions sont épurées, très peu narratives.
Je me suis interdit de raconter des histoires. Je voulais planter des clous, que le résultat soit ténu. J’utilise un vocabulaire courant et pour chaque chanson, je rédige quatre ou cinq pages de texte en roue libre puis je sors le marqueur et je resserre au maximum. C’est du sport. Je laisse passer le flux et parfois je me surprends de ce qui en sort, c’est jubilatoire. La chanson ne devrait jamais finir dans un livre, c’est fait pour flotter. Certains textes très jolis sur le papier ne font pas toujours des bonnes chansons. L’important n’est pas la valeur littéraire, mais la mise en bouche. Pour moi, le meilleur texte du monde, c’est Be-Bop-A-Lula. C’est une onomatopée, mais au moment où c’est chanté, ça fonctionne. Je voulais également éviter le radotage dans lequel je suis tombé par moments.
Y a-t-il certains thèmes que tu as souhaité éviter ?
La politique. Il y en a sur chaque disque et ça fait vingt ans que ça dure ! Après L’Assistant Parlementaire, j’aurais pu décliner la liste : Le Conseiller Municipal, Le Député En Examen… (Rires.) Malgré tout, Ce Qui Nous Atteint l’est peut-être sur Ici-Bas, Ici Même. Essayer de procurer de l’émotion, c’est politique.
Tu as rarement abordé la paternité, or tu es père d’un adolescent.
C’est vrai, il reste beaucoup de chansons à écrire. Musicalement, c’est une autre paire de manches, mais pour l’écriture, il reste de nombreux sujets à aborder. Un album sur l’adolescence pourrait être drôle, on peut multiplier les angles. J’ai passé mon adolescence dans un groupe (ndlr. Printemps Noir), c’était fabuleux, dingo, une vraie vie parallèle. Comme une équipe de basket sans entraîneur, sans fédération, comme un groupuscule. C’était mes référents.
Reconnais-tu Brest depuis ton retour ? La rénovation de Recouvrance l’a-t-elle gentrifiée ?
(Il éclate de rire.) Pour arriver à gentrifier Brest, il faut se lever de bonne heure. Il doit y avoir deux bars lounge qui se sont installés, mais pas six !
Ces derniers mois, l’Ouest a beaucoup fait parler de lui avec le mouvement des Bonnets Rouges, le conflit sur le site de l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes…
Je trouve enthousiasmant de voir des gens se battre pour une cause. La lutte contre l’aéroport me rappelle celle contre la centrale nucléaire de Plogoff en 1980. On avait réussi à faire reculer le pouvoir. De toute façon, ce n’était pas possible de se trouver en guerre avec une population. Ça aurait pu finir avec des morts, c’était ultraviolent. Pour les Bonnets Rouges et l’écotaxe, c’est plus compliqué. L’époque est trouble et l’idéalisme ne se porte hélas plus sur des idées de gauche. Le Parti socialiste en est responsable, l’écotaxe est arrivée juste après l’affaire Cahuzac, ça a dégoûté tout le monde. Historiquement, les Bonnets Rouges se révoltaient contre les seigneurs en 1675. Or aujourd’hui, il y a beaucoup de seigneurs au sein des Bonnets Rouges puisqu’on retrouve certains leaders de la FNSEA à leur tête. Ce mouvement est pragmatique et défend une économie libérale, donc je ne suis pas d’accord. En revanche, je soutiens complètement l’idée d’une autonomie de la Bretagne. Ce jacobinisme est devenu délirant. L’enseignement de l’histoire de la Bretagne à l’école, c’est pour moi une évidence absolue car on n’apprend pas aux Français d’où ils viennent. Avec cette mondialisation terrible, c’est normal qu’on veuille retrouver un peu de nos racines. Vu de Paris, ce que je dis semble être l’horreur absolue, un appel au repli sur soi, mais la particularité de la Bretagne, c’est que le vote Front national est pratiquement inexistant. Notre rapport aux immigrés est tranquille car les Bretons voyagent eux-mêmes beaucoup. Mes voisins ou certains amis qui sont dans la marine marchande ont fait plusieurs fois le tour du monde.
Et toi, comptes-tu repartir un jour ?
Je ne sais pas. Là, tous les matins, je regarde l’océan comme un crétin et la journée se passe super bien. (Sourire.) La musique est un boulot incohérent, je vais bien voir ce qui me tombe sur la tête. Mais ce qui reste fabuleux, c’est qu’on peut composer partout.
Dans Samedi Soir Au Vauban, tu fais un clin d’œil à cette fameuse salle de concert brestoise.
Tous les musiciens français qui y ont joué un soir s’en souviennent. L’hôtel au-dessus, le restaurant au rez-de-chaussée et la musique en bas. Généralement, jouer là-bas implique de faire la fermeture sur les coups de six heures du matin. Le rapport à la musique et aux gens est assez énorme. Il y a de chouettes salles en France mais je ne connais pas d’endroit pareil. C’est resté dans le jus depuis l’après-guerre et transmis de génération en génération. Je connaissais le père du patron actuel Charles Muzy, je connais Charles… C’est foutraque mais ce n’est pas pour tout le monde. J’y ai joué des tas de fois, d’autant qu’on a fêté les cinquante ans du Vauban, puis le premier anniversaire des cinquante ans du Vauban, et en octobre, ce sera le deuxième anniversaire des cinquante ans.
Les cinquante-deux ans donc ?
Non. Enfin oui, mais personne ne le dit, ça reste le deuxième anniversaire des cinquante ans du Vauban. (Rires.)
Mais en avril, c’est au Quartz que tu fêteras tes vingt ans de carrière.
Oui, j’ai envie de faire une belle création avec des lumières et sortir un peu du “concert Vauban”. On a gambergé mais on n’a pas commencé les répétitions. Sur scène, il y aura Nathalie Réaux au chant et aux percussions, Hugo Cechosz à la contrebasse. Pour le reste, ce sont des nouveaux musiciens.
Les nouveaux titres sont doux mais ils seront forcément transformés sur scène.
Je n’ai pas la technique de l’interprète. Le concert est une chose tellement pas naturelle que tu mets les pieds dedans et au bout de trois ou quatre minutes, tu vois comment tu es. Je suis incapable de reproduire le même concert et je n’aime pas quand c’est truqué. Si tu vas au concert, c’est pour vivre le moment.
Quels concerts t’ont marqué récemment ?
Neil Young aux Vieilles Charrues, une énorme claque. J’aime beaucoup Fiodor Dream Dog, la formation de Tatiana Mladenovitch, batteuse de Bertrand Belin. Nathalie Réaux joue dans ce groupe, c’est très sophistiqué au niveau des harmonies. Le disque n’est pas très bien enregistré mais sur scène, c’est superbe. C’est barjot que ce groupe ne soit pas encore signé d’ailleurs. Aujourd’hui, les jeunes artistes qui déboulent doivent avoir tourné des clips, annoncer tant de vues sur Internet… Il faut presque avoir un produit fini à donner aux boîtes de disques, il y a même des stages pour apprendre à se tenir sur scène. (Rires.) Cette professionnalisation à outrance est folle. On t’apprend à être dans les clous alors qu’il faut être déraisonnable pour faire de la musique. Lorsqu’on a commencé les concerts, beaucoup d’endroits nous refusaient, suite à la casse. Je ne voulais pas servir aux gens ce qu’ils attendaient, je n’avais pas envie d’être un gentil garçon. Mais ça fait des années que je n’ai pas massacré un concert.
On lit d’ailleurs à chaque album que Miossec est apaisé.
Mais c’est faux. Je n’écrirais pas si j’étais apaisé. Je n’aurais pas à me coltiner ce bourrier qui est de faire des chansons. À l’inverse, j’ai eu droit à “écorché vif” pendant des périodes où je me sentais impeccable. C’est du grand-guignol quand même.
Lorsque Boire est sorti, tu avais trente ans. Vingt ans après, qu’est-ce qui te pousse à continuer ?
Eh bien, entre être apaisé et s’emmerder, la limite est très, très faible. (Rires.) La musique c’est génial pour ne jamais s’ennuyer. J’aime le boxon. Je tiens à cette vie, partir en tournée, se retrouver dans des rapports sociaux très intenses avec une bande et se débrouiller pour que tout se déroule le mieux possible. Les meilleurs rapports sociaux que j’ai expérimentés au travail, c’était dans les boulots de prolos. On se serrait les coudes, les relations étaient franches. Dans les boulots de cadres, j’ai vu des gens armés en train de s’entretuer pour des places à prendre.
Tu n’as jamais chanté sur cette vie de tournée, ces à-côtés du métier.
Je voulais écrire une chanson qui évoque le fourgon car cet espace prend une importance incroyable dans la vie d’un musicien. Il passe plus de temps dans le fourgon que sur scène. J’avais cette petite idée, et puis Dominique A a chanté Dans Un Camion. C’était très bien vu, très bien écrit.
Vas-tu aider Albin de la Simone sur sa prochaine œuvre ?
Oh non, il n’a pas besoin de moi, ni pour écrire ni pour composer. Mais on s’est fait du bien l’un à l’autre, c’était chouette. J’aimerais bien retravailler avec lui, je crois qu’on a encore des choses à raconter. Je songe déjà à mon prochain disque sinon ce ne serait pas drôle.
Tu l’imagines comment ?
Si je me remettais à composer aujourd’hui, ce serait la consternation générale. (Rires.) Ce qui me passe par la tête est un peu farfelu, j’écoute beaucoup trop d’orchestres argentins.