(Without Consent/PIAS Cooperative)
Un léger et excitant parfum de soufre rôde quand on prononce le nom de Fat White Family. À moins qu’il s’agisse d’un juste retour des choses dans la mythologie pop, avec sa trilogie sexe, drogue et rock’n’roll sur le mode le plus festif qui soit.
Encore assez discret – commercialement s’entend –, le sextette anglais s’avère indéniablement marquant pour qui a eu la chance de l’avoir croisé sur scène. Le qualificatif “chaotique” n’est en rien exagéré en concert : soutenu par ses musiciens complètement défoncés (doux euphémisme), le chanteur aime à démarrer ses spectacles en transe totale pour les terminer en tenue d’Adam.
Ce chanteur, Lias Saoudi pour l’état civil, est connu pour ses positions politiques très ancrées à gauche, viscéralement anti-yuppies notamment. Le rock retrouve une conscience, un esprit revendicatif. Et Saoudi de devenir un bon leader charismatique, potache et spirituel.
Dans Songs For Our Mothers, le trublion chante des textes évidemment concernés, qu’il traite du plus grand tueur en série britannique Harold Shipman (When Shipman Decides) ou qu’il disserte sur le nazisme (Duce, Goodbye Goebbels).
Ce dernier sujet semble le travailler comme l’enfance flinguée le torturait sur le précédent disque Champagne Holocaust (2013) – Bomb Disneyland ou le désormais incontournable Cream Of The Young sur la pédophilie. Musicalement, par rapport au premier effort, Songs For Our Mothers déploie un tempo beaucoup plus lent, presque cotonneux, mais le climat demeure sacrément possédé.
L’arbre psyché-stone cache la forêt de l’angoisse voire de la paranoïa. Derrière la fumée pointe la lucidité à travers des chœurs ésotériques façon Killing Joke (Duce) ou gonflés à l’hélium (When Shipman Decides). On pourrait encore évoquer cette espèce de nervosité en dedans larguée par un Lias épileptique le temps d’un faux refrain sur Whitest Boy On The Beach.
Forcément, il y a dans cette famille white trash une filiation avec Happy Mondays et The Fall – Lias n’y va pas par quatre chemins quand il interprète I Am Mark E Smith. Songs For Our Mothers devrait donc effectivement parler aux mamans qui se trémoussaient sur Totally Wired au début des années 80. Et aux autres aussi.