(Caldo Verde Records/Rough Trade Records/Wagram)JTNDaWZyYW1lJTIwd2lkdGglM0QlMjIxMDAlMjUlMjIlMjBoZWlnaHQlM0QlMjI0NTAlMjIlMjBzY3JvbGxpbmclM0QlMjJubyUyMiUyMGZyYW1lYm9yZGVyJTNEJTIybm8lMjIlMjBzcmMlM0QlMjJodHRwcyUzQSUyRiUyRncuc291bmRjbG91ZC5jb20lMkZwbGF5ZXIlMkYlM0Z1cmwlM0RodHRwcyUyNTNBJTJGJTJGYXBpLnNvdW5kY2xvdWQuY29tJTJGdHJhY2tzJTJGMjI3Mjc2OTc1JTI2YW1wJTNCYXV0b19wbGF5JTNEZmFsc2UlMjZhbXAlM0JoaWRlX3JlbGF0ZWQlM0RmYWxzZSUyNmFtcCUzQnNob3dfY29tbWVudHMlM0R0cnVlJTI2YW1wJTNCc2hvd191c2VyJTNEdHJ1ZSUyNmFtcCUzQnNob3dfcmVwb3N0cyUzRGZhbHNlJTI2YW1wJTNCdmlzdWFsJTNEdHJ1ZSUyMiUzRSUzQyUyRmlmcmFtZSUzRQ==Pur produit des seventies, Mark Kozelek n’a jamais cessé de semer des indices. Dès 1994, il colle une magnifique reprise de Kiss sur le maxi Shock Me EP de Red House Painters. L’Américain instaure alors une manière de faire en matière de relecture, à savoir débarrasser les originaux de leurs habits d’époque pour leur refaire le portrait à sa façon. Sa plus belle réussite dans le genre reste d’avoir transformé le titre sautillant et potentiellement très niais Silly Love Songs des Wings en une montagne sacrée et enneigée digne de Neil Young & Crazy Horse.
Sur le même album, Songs For A Blue Guitar (1996) de Red House Painters, il va jusqu’à rendre supportable l’irritant Long Distance Runaround de Yes. C’est dire les cojones du gars. Kozelek s’est donc trouvé très tôt une spécialité – voire une réputation – dans le relooking plus ou moins extrême, allant ensuite jusqu’à consacrer des disques entiers aux chansons d’AC/DC (What’s Next To The Moon sous son nom en 2001) ou de Modest Mouse (Tiny Cities de Sun Kil Moon en 2005).
Sur le premier LP de Sun Kil Moon, Ghosts Of The Great Highway (2003), il fait une fine allusion à Glenn Tipton et K. K. Downing, la paire de guitaristes de Judas Priest. Plus récemment, sur Benji (2014), l’extrait I Watched The Film The Song Remains The Same fait explicitement référence à ce monument d’autosatisfaction commis par Led Zeppelin en 1976. Mark Kozelek ne serait-il pas en réalité un Robert Smith d’Amérique qui, à la lettre B, aurait choisi Black Sabbath plutôt que Bowie ?
Si on prend à la file toutes les œillades et autres accolades faites au metal dans la discographie de Kozelek, cette collaboration avec Justin K. Broadrick n’est donc ni surprenante, ni incongrue. Mais quand même, Jesu, ce n’est pas rien ! Le CV à rallonge de l’Anglais (Napalm Death, Godflesh, Techno Animal, on en passe et des pires) fera d’emblée fuir les puristes du folk déclamatoire atypique et de moins en moins envapé que Sun Kil Moon nous sert depuis des années.
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En dehors des boîtes à rythmes à peine percutantes et des guitares un peu plus abrasives qu’à l’ordinaire, Jesu/Sun Kil Moon ne fait pas plus que la somme de ses côtés… ce qui est déjà beaucoup. On le comprend dès la chanson d’ouverture Good Morning My Love (tu parles) suivie des déflagrations salutaires et infernales de Carondelet.
Ce véritable premier album de blues du XXIe siècle, mis à part trois morceaux qui auraient fait notre ordinaire lorsque ce magazine élisait Psyence Fiction (1998) d’UNKLE meilleur disque du mois, se consacre à la continuation d’une œuvre aussi imparfaite qu’imposante. Ainsi, les compositions restent celles de l’ancien Red House Painters, un groupe dont on reconnaît l’identité dans les riffs faits d’arpèges descendants qui transcendent les récits (Sally). Idem lorsqu’il vire tout le monde sauf les chœurs pour reprendre les rênes sur Fragile (encore une référence à Yes).
Après un petit hommage rendu à la new-wave anglaise, de The Cure à Cocteau Twins en passant par The Durutti Column (America’s Most Wanted Mark Kozelek), Jesu et Sun Kil Moon concluent leur entreprise commune sur les traces d’Eno (Exodus, Beautiful You). Histoire de calmer le jeu, de passer d’un génocide forestier à une banquise contemplative sans trop se soucier des conséquences. Il n’y avait qu’un Mark Kozelek bien entouré – on retrouve aussi ici Will Oldham, Low, Isaac Brock (Modest Mouse) et Rachel Goswell (Slowdive) – pour réaliser un disque aussi impressionnant… en ayant l’air de n’en avoir – une fois encore – rien à carrer. Et pourquoi pas Sunn O))) Kil Moon pour la suite ? Ben voyons…
Etienne Greib