Le groupe de Chicago est de retour avec son nouvel album Any Day. Coup de coeur de la rédaction, le disque est une invitation lancée aux amoureux d’une pop délicate. The Sea and Cake seront de passage à la Villette Sonique le samedi 26 mai sur la scène périphérique.
En musique comme en peinture, savoir faire simple est parfois le plus compliqué. Ôter le superflu, épurer les lignes pour toucher à l’essentiel : telle pourrait être la devise des Américains The Sea and Cake, qui signent avec Any Day leur onzième album en vingt-cinq ans de carrière (le précédent, Runner remonte à 2012). Ceux qui, comme nous, ont toujours suivi avec intérêt la progression du groupe de Sam Prekop ne seront guère surpris de l’apprendre : tout ce qui faisait le charme de The Fawn (1997), Oui (2000) ou One Bedroom (2002) – une pop ligne claire au parfum délicat de cool-jazz et de bossa nova – est une fois de plus au rendez-vous, exécutée avec élégance et retenue par quatre musiciens qui se connaissent par cœur.
Issu comme Tortoise et Gastr Del Sol de la scène de Chicago, The Sea And Cake a toujours fait figure d’anomalie au sein de l’écurie Thrill Jockey. Au milieu des années quatre-vingt-dix, quand d’autres expérimentent à tout-va et privilégient les longues plages instrumentales du post-rock, eux préfèrent rester fidèle au format chanson, tout en s’imprégnant plus ou moins des mêmes influences – krautrock, dub, lounge music. La formule est simple et sophistiquée à la fois, et très vite, The Sea And Cake affirme son identité sous l’impulsion du batteur John Mc Entire – par ailleurs tête-pensante et producteur de Tortoise – et du chanteur Sam Prekop dont les accents de voix, souvent proches du New-Yorkais Arto Lindsay, vont devenir la signature du groupe.
Aujourd’hui encore, l’interaction parfaite entre les quatre musiciens fait la différence : Sam Prekop et Archer Prewitt (guitare), Eric Claridge (basse) et John Mc Entire (batterie) n’ont jamais aussi bien joué ensemble, même après six ans d’absence. Tel un combo de jazz qui s’interdirait toute démonstration technique, tout semble ici couler de source, comme sur le délicieux instrumental Paper Window, à peine réhaussé par les « pa pa pa » rêveurs de Sam Prekop.
Cette fluidité instrumentale serait vaine si elle n’était pas mise au service de grandes chansons. Auteur sensible et fin mélodiste, Sam Prekop gratifie Any Day de plusieurs pépites, à commencer par le morceau-titre, une superbe bossa nova légère comme une brise d’été. Avec son air de ne pas y toucher (I Should Care), le chanteur – dont la carrière solo mérite aussi d’être redécouverte, si l’on excepte le dernier The Republic (2015) incursion ratée dans l’electronica – signe même en fin de parcours l’une de ses plus belles mélodies avec l’irrésistible These Falling Arms, quatre minutes de pur bonheur enluminées par les arpèges de guitare d’Archer Prewitt. Le printemps est là, The Sea And Cake est de retour. Que demander de plus ?
Cyril Sauvageot