Avec "Bonheur ou Tristesse" de Lesneu, "Ludi" de Chassol ou encore "Mind The Neighbors" de Ryan Power et "Baby Love" de Jean-Louis Murat, Magic vous a sélectionné les albums importants qui sortent ce vendredi 6 mars.
LESNEU – Bonheur ou Tristesse
(MUSIC FROM THE MASSES / [PIAS])
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Alors qu’Édouard Baer, dans le rôle d’Otis dans Astérix et Obélix Mission Cléopâtre, chantait la vie, Lesneu préfère chanter l’amour tout en ressuscitant la période Devotion -Teen Dream de Beach House. Bonheur ou Tristesse est un album en clair-obscur à la recette simplissime. Un orgue Yamaha-PS20 crée cette atmosphère onirique qui infuse tout le disque de sa langueur, à laquelle viennent s’arrimer une basse et une batterie aussi classieuses que minimalistes. Ainsi que des guitares qui sont tantôt jouées en riffs déchirants, tantôt en arpèges cristallins. Rien de plus. Enfin, si. Une voix de crooner un peu gauche mais terriblement attachant, qui tenterait désespérément d’avaler sa timidité afin d’inviter la personne qui lui plaît à l’accompagner au bal de fin d’année. Bal de fin d’année où Lesneu serait plus qu’à son aise au milieu de la scène avec ses claviers, tant il affectionne réhabiliter l’exercice du slow à l’ancienne. Il vous fera tout simplement chavirer dans un océan d’émotions. Et jamais noyade n’aura été aussi douce.
CHASSOL – Ludi
(TRICATEL)
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Après sa trilogie d’ultrascores (la méthode d’«harmonisation du réel» qu’il a développée) commencée à la Nouvelle Orléans (Nola Chérie, 2011), poursuivie en Inde (Indiamore, 2013) et close en Martinique (Big Sun, 2015), Christophe Chassol met un peu de côté l’aspect documentaire ou autobiographique de ses films, pour proposer avec Ludi, à la fois disque, film et spectacle, une réflexion synesthésique sur le thème du jeu. Chassol révèle l’harmonie invisible, cosmique, qui nous entoure partout et tout le temps, grâce au cinéma et à la musique, en joyeux alchimiste.
RYAN POWER – Mind the Neighbors
(FEEDING TUBE RECORDS)
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Attention, petit bijou. Le cinquième album de Ryan Power est de ces disques tout en nuances, en rondeur, qu’on aime passer d’abord parce qu’ils sont tellement agréables, puis parce qu’on en est devenu accro.
U.S. GIRLS – Heavy Light
(4AD)
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Magic avait quitté Meg Remy en porte-voix féministe rageuse sur son sixième album, In a Poem Unlimited (2018), pleine de rancœur envers les hommes. Comme l’album précédent, Heavy Light doit être lu dans une perspective sociale ou morale. ll s’adresse à toutes les jeunes filles en mal d’avenir.
JEANINES – Things Change
(WIAIWYA)
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Il n’y a pas une minute à perdre avec Jeanines ! À la manière de Frankie Cosmos, il suffira de sept minutes pour que ce trio nous présente leurs quatre nouveaux titres. Un brin anti-folk, la voix d’Alicia Jeanine, portée à la fois par une douce mélancolie et par une énergie débordante, accompagne, sous des traits faussement naïfs, une musique pop délicieuse aux harmonies particulièrement travaillées. On suggère à Jeanines de ne rien changer.
JONATHAN WILSON – Dixie Blur
(BELLA UNION / [PIAS])
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La dernière livraison de Jonathan Wilson, Rare Birds, il y a deux ans, avait laissé dubitatif : très californien et psychédélique, trop ampoulé. Il revient plus sobre avec l’émouvant Dixie Blur. Avec sa voix légère, pleine d’humilité, Wilson délaisse les arrangements sophistiqués, pourtant une de ses marques de fabrique. Cette nudité lui va à ravir.
HONEY HARPER – Starmaker
(ATO RECORDS / [PIAS])
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Le premier album de l’Américain annonce la couleur dès son introduction au Vocoder. C’est au meilleur de la Cosmic American Music telle que théorisée par Parsons que nous convie Harper sur The Day It Rained Forever et Strawberry Lite, où sa voix faisant honneur à son prénom (“Honey”, miel) se confond avec quelques heavenly voices estampillées 4AD. Une musique d’autoroute menant vers les étoiles.
CODDIWOMPLE – The Walk and Other Stories
(A TANT RÊVER DU ROI)
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Après Mellanoiscape, Baum ou ses collaborations avec Régis Boulard, le guitariste rennais Olivier Mellano poursuit une aventure du collectif avec Coddiwomple. En résulte un disque bipolaire entre tensions et accalmies.
VIAGRA BOYS – Common Sense EP
(YEAR0001)
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Les Suédois de Viagra Boys sont la sensation post-punk du moment. Un statut que ce nouvel EP, Common Sense, composé de quatre morceaux à la densité impressionnante, vient confirmer. Ces mâles survoltés savent composer avec des sonorités rugueuses, anguleuses et des braillements nonchalants. Avis aux amateurs de Fat White Family et HMLTD, Viagra Boys, c’est THE next big thing.
STEPHEN MALKMUS – Traditional Techniques
(DOMINO RECORDS)
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Traditional Techniques serait l’album world music de Stephen Malkmus, plein de sons et d’instruments venus des Balkans, du Caucase ou d’ailleurs. La jolie supercherie ne dure que le temps des trente premières secondes de ACC Kirtan. Ce disque est avant tout un plaisant recueil folk rock, familier et souvent rassurant. Du Malkmus tout craché.
JEAN-LOUIS MURAT – Baby Love
(LE LABEL / [PIAS])
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En 1989, Murat sortait Cheyenne Autumn, où il était déjà beaucoup question d’amour, souvent contrarié. Trois décennies plus tard, Baby Love fait écho à ce premier disque majeur, tout en en prenant le contre-pied. Au programme, la même association de l’Auvergnat et du maître ès synthés Denis Clavaizolle et la même thématique (l’amour, bébé), mais dans un packaging rose flashy qui annonce la couleur. Même habillé de rose, Murat n’en finit pas de chanter la note bleue.
ANNA CALVI – Hunted
(DOMINO RECORDS)
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Hunted enfonce le clou de Hunter, paru il y a deux ans et qui explorait la sexualité, assumait l’étrange et dynamitait les frontières de genre. Anna Calvi revisite ici les chansons de son précédent album en se recentrant sur sa guitare et sa voix. Elles rendent plus éclatants leur propos féministe et la virtuosité d’une interprète affranchie.
LUKE HAINES & PETER BUCK – Beat Poetry for Survivalists
(CHERRY RED RECORDS)
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Le leader de The Auteurs et le guitariste de REM. Sur le papier, l’attelage a de quoi surprendre. Quand il s’agit de musique, Haines et Buck ne sont pas des peintres et racontent de drôles d’histoires sur fond de glamrock et de guitares parfois carillonnantes. Mais nous ne tirerons pas sur cette Rock’n’ Roll Ambulance, le titre qui clôt lascivement le disque. Elle tient très bien la route.
CAROLINE ROSE – Superstar
(NEW WEST RECORDS)
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Dans Superstar, Caroline Rose raconte une course folle pour déguster un petit morceau de célébrité. Une chevauchée fantastique tout en ironie et en facéties qui, sous des atours pop au kitsch assumé, interroge de façon grinçante notre société où beaucoup sont prêt.es à tout pour leur quart d’heure de gloire.
SWAMP DOGG – Sorry You Couldn’t Make It
(JOYFUL NOISE RECORDINGS)
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L’excentricité que Swamp Dogg s’est forgée tout au long de sa carrière disparaît devant la simplicité de ce nouveau disque. Jerry Williams Jr., soixante-dix-sept ans, musicien depuis ses douze ans, revient aux sons de son enfance : la country. Sorry You Couldn’t Make It pourrait s’inscrire dans la lignée des classiques du Great American Songbook, l’autoroute de la chanson US.
SAROOS – OLU
(ALIEN TRANSISTOR)
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Pour son cinquième LP, le trio allemand formé par Florian Zimmer a choisi le format mixtape. Leur foisonnante musique électronique mid tempo – plus abstraite que jamais – méritait ce format propice au laisser-aller. Seul fil conducteur entre ces seize titres ? Une libre pensée qui justifie la place du groupe sur le fameux label Alien Transistor.
COCOROSIE – Put the Shine on
(MARATHON ARTISTS)
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Pour ce septième album, le duo de sœurs américaines Bianca et Sierra Casady assume une belle dualité. Les deux musiciennes parviennent, en un album, à maîtriser subtilement tous ces sentiments qui semblent nous habiter depuis la jeunesse : un peu d’anxiété pour soi-même, de la colère face au monde, et beaucoup d’énergie théâtrale à dépenser sans s’arrêter.
DISQ – Collector
(SADDLE CREEK RECORDS)
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“This is my daily routine, spending hours on a computer screen”. C’est ainsi, avec une voix aussi pâteuse et nauséeuse d’un lendemain de cuite, qu’Isaac de Broux-Slone débute le premier album de Disq. Ce quintette à l’allure de casting d’un remake de Breakfast Club est le chaînon manquant entre Car Seat Headrest et Shame. En façonnant un slacker post-punk en état de panique constant, Disq en profite pour nous cracher à la gueule le dégoût d’une vie inintéressante au fin fond du Wisconsin.
ISLET – Eyelet
(FIRE RECORDS)
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Voilà quatre ans que les aficionados de pop hallucinée espéraient un retour d’Islet. Ayant sûrement eu vent de leurs prières, le trio gallois se pose à nouveau sur notre planète avec Eyelet. Une véritable comète pop.
Mais rien ne vous empêche d’écouter les autres sorties du jour :
MAXENCE CYRIN – Aurora (Warner Classics)
NOEL GALLAGHER’S HIGH FLYING BIRDS – Blue Moon Rising (Sour Mash)
SHMU – Pure Bliss (Requiem pour un Twister)
NADIA REID – Out Of My Province (Spacebomb Records)
LAGUERRE / NOETINGER – DnT (Revlab Records)
NADESH & BEKI – Dream Bitches EP (Kwaidan Records)
SPHAREOS – Possession (Pan European Recording)
THE JAMES HUNTER SIX – Nick of Time (Daptone Records)
THE CINEMATIC ORCHESTRA- To Believe Remixes (April 24)