Playlist : “Un brouillon d’été”, par Jean-Marie Pottier

Durant ce confinement, c'est au tour des journalistes de Magic de présenter leur cheminement musical au travers d'une playlist de cinquante morceaux triés sur le volet, accompagnée d'un texte de leur composition. Pour commencer cette série, c'est Jean-Marie Pottier qui vous a compilé les musiques qui ont fait de lui le mélomane qu'il est aujourd'hui. Au programme : Françoise Hardy, Jacno, The Durutti Column ou encore Gal Costa !

Essayer de rassembler en une playlist «ses» cinquante chansons, c’est un peu comme fouiller dans ses placards en période de confinement, on n’y déniche jamais seulement ce qu’on était venu chercher. Ne serait-ce, bien sûr, que parce que «ses» cinquante chansons, cela n’existe pas et qu’on se retrouverait bien embarrassé si on devait les embarquer pour une île déserte, avec le désir de rembarquer à peine le rivage atteint pour en changer quelques-unes. De cette sélection, je garde bien sûr des extraits de chefs-d’oeuvre certifiés usés jusqu’à la corde, Yankee Hotel Foxtrot, Tropicália, Third ou le toujours plus immense, les années passant, Magnolia Electric Co. de Songs: Ohia. Mais aussi des trésors plus ou moins bien cachés que je veux partager à la moindre occasion, comme le Befriended des Innocence Mission, récemment objets d’un entretien passionnant dans le numéro 219 de Magic, Hate des Delgados, Se o Caso é Chorar de Tom Zé ou The Sin of Pride des Undertones, dont le morceau final constitue la plus belle fin d’album de l’histoire de la pop. Des pépites associées pour toujours dans mon cerveau à des grands moments de cinéma (vous vous rappelez du cinéma ?), comme le Elenore des Turtles repris par Gianni Morandi chez Marco Bellocchio (Fais de beaux rêves), Scalo A Grado de Franco Battiato (Bianca de Nanni Moretti), l’ouverture jouissive de Phantom of a Paradise ou l’épiphanie radieuse sur une plage russe du récent Leto. Des morceaux de grands, peut-être, sans doute pas leurs plus grands mais les plus nécessaires pour moi à cette minute de ce jour-là (Glad Tidings de Van Morrison, Tonight We’ll Be Fine de Leonard Cohen, Break Away des Beach Boys ou Birds in Your Garden de Pulp, avec son riff de guitare si simple et si bouleversant). Des chansons qui semblent résonner avec l’esprit du moment, comme cet hommage de François Hardy à un des nouveaux passe-temps préférés du confinement, sur des paroles cosignées par Patrick Modiano (Je fais des puzzles) ou le manifeste nonchalamment casanier et toujours culte de Pavement (Range Life). Le tout dans un esprit délibérément plutôt ensoleillé, même si, n’est-ce pas Neil Young, de vilains nuages pointent toujours à l’horizon sur la plage. Un Sketch For The Summer en attendant bientôt, on l’espère, l’été, le vrai, dans la vraie vie.

https://open.spotify.com/playlist/6Qr5lYozj3b0xsTqQvFqUm

à lire aussi