Illustration par Julia Borel pour le dossier rap-pop de Magic
Illustration : Julia Borel

Les 10 incontournables des hybridations pop-rap

Magic consacre, dans son n°221, un dossier aux musiques frontières entre la pop et le rap. Nous publions ici le guide d'écoute qui sert à l'illustrer.

RED HOT CHILI PEPPERS
Blood Sugar Sex Magik 
1991 

Après avoir donné l’idée de sampler Walk this Way d’Aerosmith à Run–D.M.C., le producteur Rick Rubin s’est occupé de Blood Sugar Sex Magik, cinquième album des Red Hot. Guitares, basse, batterie, percussions, orgue, rap, chant et voix scandée s’y côtoient sans complexes. L’iconique Give It Away est le premier tube avec une instrumentale rock et une voix lead très «rappée». Le refrain sera plus tard repris dans le titre Break Ya Neck de Busta Rhymes puis dans Get It Again de Mac Miller. 

BEASTIE BOYS
Check Your Head 
1992 

En 1983, ce qui était un groupe de punk hardcore s’est transformé en un trio de hip-hop improbable : des Juifs de Brooklyn à la dégaine de skaters et à l’attitude nonchalante qui rappent à propos de filles, de fêtes et de vandalisme. Check Your Head, le troisième album des Beastie Boys, délaisse la composition à partir de samples et revient au cocktail guitares, basses, batteries lo-fi. Si l’héritage rap est clair entre les pluies de scratch et le break beat, on entend aussi celui des Ramones dans Time for a Living et de Bob Dylan dans Finger Lickin’ Good

RAGE AGAINST THE MACHINE 
Rage Against The Machine 
1992 

C’est dans les clubs de Los Angeles que Zack de la Rocha, guitariste issu de la scène punk, s’essaye aux improvisations de rap, inspiré par KRS-One et Run–D.M.C. Il y rencontre Tom Morello, guitariste venant du rock et diplômé de sciences sociales. Ensemble ils mélangeront Black Sabbath et Public Enemy, hard rock et rap. Leur premier album recense guitares de Hendrix, lignes de basses post-punk et propos social, anticapitaliste et révolutionnaire. Résulte de cette formule Killing in the Name Of, devenue véritable hymne pop(ulaire). 

OUTKAST 
Stankonia 
2000 

Contrairement aux précédents exemples, Outkast est un duo de rap afro-américain et non une formation dont le fondement est de mélanger rock et rap. Dans leur quatrième album Stankonia, les Atlantiens poussent au paroxysme leur flirt avec les dieux du black-rock (Hendrix, Sly Stone, Prince ou encore Funkadelic) avec des guitares électriques et des distorsions ça et là, entre de doux moments de funk rap. Le sulfureux titre d’ouverture Gasoline Dreams annonce franchement la couleur. 

THE ROOTS
Phrenology 
2002 

The Roots est l’une des rares formations rap à être composée d’un véritable groupe, d’ailleurs mené par le grand Questlove. Juste après avoir accompagné Jay-Z sur plusieurs dates, les Philadelphiens sortent Phrenology, avec punk instrumental (!!!!!!!), paroles intimes et tristes (Water) et surtout riffs à la Stones dans le désormais culte The Seed (2.0), chanté par Cody Chesnutt, peut-être le meilleur exemple de rap-rock qui soit. Rock dans l’attitude, Phrenology sera nommé aux Grammy du meilleur album rap aux côtés d’Eminem et Nas. 

DANGER MOUSE
The Grey Album 
2004 

Brian Burton, adepte des mash-up, s’était déjà essayé à superposer les voix de Nas sur les beats de Portishead avant de s’attaquer en 2004 à un mélange des plus audacieux : celui des morceaux a cappella du Black Album du rappeur Jay-Z avec des samples du White Album des Beatles. Les kicks, snares, ligne de basse, chœurs et guitares ont été extraits des plus grands tubes des Beatles en toute illégalité, s’appuyant sur le principe de sample des rappeurs qui utilisent la matière sonore d’autrui comme d’instruments à leur disposition. Trois mille copies de l’album sont vendues avant que la major EMI n’en fasse interdire la vente. Les albums de De La Soul ne seraient jamais sortis avec une telle minutie juridique. 

BLAKROC
Blakroc 
2009 

Fruit d’une collaboration improbable entre les Black Keys, duo de l’Ohio de blues rock, et Damon Dash, à la tête du label de hip-hop Roc A Fella, Blakroc cumule les featurings de renom : de Ludacris et Ol’ Dirty Bastard du Wu-Tang Clan (sur Coochie) à Mos Def (sur On the Vista et Ain’t Nothing Like You), RZA (sur Tellin’ Me Things et Dollaz & Sense) ou Q-Tip (de A Tribe Called Quest sur Hope You’re Happy). Derrière ce cocktail réussi de blues, de psych rock et de rap, l’écriture pop de Dan Auerbach assure refrains infectieux et mélodies entêtantes. 

GORILLAZ 
Plastic Beach 
2010 

Si les deux premiers essais du groupe de Damon Albarn ont su fédérer, Plastic Beach marque un tournant, avec ses innombrables concessions au rap qui ont déboussolé bien des «popeux». On y entend l’omniprésence du hip-hop avec des productions électroniques et pulsées à tout-va. Le rap donne aussi l’avantage aux featurings avec la présence de nombreuses pointures telles Mos Def, Snoop Dog, De La Soul et Kano aux côtés de Lou Reed, Mark E. Smith et deux ex-Clash 

BAKAR 
BAdkid 
2018 

C’est après avoir découvert By the Way des Red Hot Chili Peppers qu’a germé l’idée d’un mélange rap et pop chez le Londonien Bakar. De cette première influence puis de ses débuts avec Skepta, star anglaise de la grime, il prend le flow mitrailleur et le support de la mixtape. De Bloc Party, des Klaxons et autres figures du computer rock des années 2000, il copie
le format groupe, les guitares acérées et les refrains pop. En résulte un son alternatif, entre hip-hop, grime, post-punk et indie rock, bien illustré par les morceaux One Way, Handful ou BADlands

Dossier complet à lire dans notre numéro 221 : Les relations tourmentées entre pop et rap, Je t’aime moi non plus.

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