Les rédacteurs de "Magic" défendent leurs dix albums de l'année dans un Top 10 très personnel. Low, Villagers et The Coral trônent dans le classement de Philippe Mathé.
- LOW, Hey Now (Sub Pop/Pias)
- VILLAGERS, Fever Dream (Domino Recordings)
- THE CORAL, Coral Island (Modern Sky)
- THE WEATHER STATION, Ignorance (Fat Possum)
- ARAB STRAP, As Days Get Dark (Rock Action Records)
- MAXWELL FARRINGTON & LE SUPERHOMARD, Once (Talitres)
- CASSANDRA JENKINS, An Owerview on Phenomenal Nature (Ba Da Bing !)
- GRUFF RHYS, Seeking New Gods (Rough Trade/Beggars)
- OLIVIER ROCABOIS… Goes to Far (Acoustic Kitty/Microcultures)
- THE WAR ON DRUGS, I Don’t Live Here Anymore (Atlantic/Warner)
Les tops 10, c’est toujours amusant. Comme beaucoup, je détaille les listes pour trouver quelqu’un qui aurait les mêmes goûts que moi (pas gagné), je m’étonne de voir certains disques faire l’unanimité (qu’est-ce que vous avez avec La Femme et Pharoah Sanders ?), je m’énerve d’en voir d’autres oubliés… Bref, je me laisse aller à une complète et totale subjectivité.
Là où ça se complique, c’est quand il s’agit d’écrire un texte pour accompagner son Top 10 personnel. Comment expliquer les disques que l’on a retenus dans un désordre esthétique le plus total ? Quel fil conducteur trouver à tout ce bazar dont ont été écartés sans aucune raison au dernier moment des disques pourtant passionnants (Dry Cleaning, The Goon Sax, Stranded Horse, liste non exhaustive…) ? Quelles métaphores filer pour donner un semblant d’intelligence esthétique à un capharnaüm total ?
Après tout, mieux vaut ne pas essayer de faire le malin et avouer tout bêtement que, oui, cela n’a aucun sens de mettre en tête de son top un album à la beauté transcendante et exigeante tel que celui de Low, la claque de l’année sans conteste, et à l’autre bout un chef-d’œuvre de production lisse et un brin pompière comme The War on Drugs parce que cette musique de stade réveille l’ado fan d’Oasis et de U2 qui se refuse à devenir totalement adulte.
Une marotte, la pop orchestrale
Aucun sens, mais quand même quelques marottes. La pop orchestrale par exemple. Avec Maxwell Farrington & le SuperHomard, et Olivier Rocabois (le Neil Hannon breton, même s’il habite en région parisienne désormais, on lui pardonne), sans oublier Outsider, le projet de Philippe Cohen Solal & Mike Lindsay, les amateurs du genre ont été servis. Voix de crooner servie sur un lit de cordes, que du bonheur.
Les groupes pop britanniques aussi. Des Anglais avec The Coral. Le groupe de Liverpool n’intéresse visiblement plus grand monde de ce côté-ci de la Manche, il a pourtant sorti un classique qui résistera aux temps, un Coral Island qui pourrait même être un disque d’île déserte.
Un Gallois avec ce bon vieux Gruff Rhys, l’ancien leader des géniaux Super Furry Animals, drôle de zigoto qui sort des albums (presque) tout le temps passionnants. Des Écossais, avec le retour en fanfare (glauque, la fanfare) d’Arab Strap et de son humour pince sans rire. Et puis un Irlandais aussi : Villagers et son sublime Fever Dreams où sa pop-folk bien coiffée se laisse aller à des expérimentations enivrantes.
Et un livre… “Passeur” de JD Beauvallet
De la folk qui prend des chemins de traverses, c’est aussi la direction qu’a choisie Tamara Lindeman avec The Weather Station, une pop (tiens, tiens) orchestrale qui évoque par moments, pour sa liberté dans la forme et dans le fond, l’immense Kate Bush. Elle crée une atmosphère singulière. Autre sacrée gueule d’atmosphère, An Overview on Phenomenal Nature de Cassandra Jenkins, voix féminine ensorcelante, à la fois rêveuse et incarnée, élue plus belle découverte de l’année.
Le panorama de cette année encore particulière ne serait pas complet sans un livre : Passeur de JD Beauvallet. Parce qu’il m’a remué, parce qu’il m’a permis aussi de rencontrer en chair et en os (pour une longue et passionnante interview à lire dans Magic) celui qui a forgé, avec ses emballements sincères et parfois sa mauvaise foi, une partie de mes goûts. À lui et aux autres de ce top 10, merci pour la musique.