Adrianne Lenker, Gorillaz, This is the Kit, Bruce Springsteen… Ça sort ce vendredi 23 octobre et Magic aime

C'est le retour de notre tour d'horizon de la pop moderne du vendredi ! Magic vous a sélectionné les sorties importantes de ce vendredi 23 octobre.

ADRIANNE LENKER – songs et instrumentals
(4AD)

Quelle est la différence entre Henry David Thoreau et Adrianne Lenker ? Réponse : un ingénieur du son et une guitare. À la faveur du confinement, la chanteuse, guitariste et compositrice en chef des New-Yorkais Big Thief (auteurs d’un formidable doublé avec U.F.O.F et Two Hands en 2019) a imité le philosophe américain en se retirant dans une cabane sans eau ni électricité. Pas tout à fait seule donc, mais suffisamment repliée sur elle-même pour faire vibrer ses douleurs et ses questionnements à l’aide d’un bestiaire imaginaire et de sa plume ultra-sensorielle. Le résultat : deux splendides albums compilés en un, moitié chansons, moitié instrumentaux.

Écoutez la critique de Laurence Buisson
dans le #3 de notre podcast pop moderne

GORILLAZ – Song Machine, Season One: Strange Timez
(PARLOPHONE)

D’un projet qui ressemblait d’abord à une playlist évolutive, Gorillaz a fait un disque. La bande “dessinée” à Damon Albarn lève aujourd’hui ce qui reste de mystère à Song Machine, Season One: Strange Timez dont les chansons sont pour moitié déjà connues puisque dévoilées au compte-goutte au cours de l’année. Un teasing XXL qui a eu le mérite de rassurer sur les talents de catalyseur d’Albarn, légèrement émoussés ces dernières années, mais capables ici d’empiler les featurings – de Fatoumata Diawara à Elton John en passant par Schoolboy Q – sans gommer la signature sonore de son vrai faux groupe.

THIS IS THE KIT – Off Off On
(ROUGH TRADE)

En 2017, les chansons de Moonshine Freeze exploraient l’impermanence de la nature et des sentiments. Celles de son successeur, Off Off On, sont cette fois autant d’exercices de contorsions folk et free jazz pour se libérer des entraves qui séquestrent de l’intérieur. La Britannique Kate Stables, alias This is the Kit, dissèque ici ses pensées et celles des autres, les formalisent tout haut, pour les chasser. Un album optimiste sur nos schémas de pensées malsains et nos croyances limitantes. Non pas claustrophobique, mais tortueux, comme nos méninges.

Écoutez la critique d’Alexandra Dumont
dans le #3 de notre podcast pop moderne

Notre rencontre avec Kate Stables :
This Is The Kit, L’Intranquille

KEEP DANCING INC – Embrace
(UN PLAN SIMPLE / SONY)

Après une paire d’EP et de compilations, les trois Parisiens de Keep Dancing Inc consacrent cinq années de concerts revigorants avec un premier album. Embrace est une grande fête électro-pop. Où la musique parle avant tout aux jambes mais où s’invitent aussi des angoisses bien d’aujourd’hui ; Long Enough aborde la course aux diplômes et ses pressions parentales tandis que Start up Nation explore la seule jungle où les emplois poussent de l’autre côté de la rue.

Écoutez la critique d’Alexandra Dumont
dans le #3 de notre podcast pop moderne

BRUCE SPRINGSTEEN – Letter to You
(COLUMBIA RECORDS)

Letter to You… Avec un titre pareil, le vingtième album de Bruce Springsteen aurait pu donner l’impression d’avoir quelque chose à dire sur l’état de délabrement démocratique de son pays. Mais à dix jours d’une élection présidentielle choc, le héraut de l’Amérique des déshérités ne s’adresse à personne d’autre qu’à son public. Le voilà qui revient flanqué du E Street Band pour un disque rock enregistré live en studio en cinq jours. Une leçon de savoir-faire autant qu’un bilan de sa propre trajectoire dans la course infinie de la musique populaire.

JEFF TWEEDY– Love is the King
(DBPM RECORDS)

Dans un livre tout juste paru, How to Write One Song, le leader de Wilco dispense ses conseils pour installer une routine de travail à destination des songwriters et des curieux. Méthode créative qu’il a lui-même éprouvée pour élaborer Love is the King. Sa tournée en groupe coupée dans son élan par la pandémie, Jeff Tweedy a écrit une chanson chaque jour jusqu’à réunir la matière de cet album de country-folk économique. Manière de photo de famille tendre et fédératrice – ses deux fils sont de la partie – et accessoirement portait craché de ses deux derniers efforts solo.

AZYMUTH – Jazz is Dead Vol.4
(JAZZ IS DEAD)

Après la légende brésilienne Marcos Valle, les sorciers du jazz et de la soul rétro Adrian Younge et Ali Shaheed Muhammad ont réussi à mettre ses compatriotes du groupe Azymuth dans un avion pour Los Angeles et un quatrième volume de leur série Jazz is Dead. La formation, pionnière d’une formule hybride mêlant funk électrique, pop et musique populaire brésilienne au début des années 70, fait ici souffler une brise tropicale sur les compositions des deux Américains.

JUANITA STEIN – Snapshot
(NUDE RECORDS)

La disparition de son père, il y a un an, a poussé l’Australienne Juanita Stein à poser ses valises chez elle et à enregistrer, pour la première fois, à distance des États-Unis, terre d’exil logique de ses rêves d’americana. Pendant huit mois, la guitariste et chanteuse des Howling Bells a façonné ce troisième album solo comme un hommage à ce père qui avait été le premier à lui ouvrir les portes de la musique américaine, du delta blues au rock’n’roll des pionniers. Passée par l’étau du deuil, sa musique se délie ici avec une ampleur inédite.

THE MOUNTAIN GOATS – Getting into Knives
(MERGE RECORDS)

Combien d’obsessionnels de passage transitent chaque année par le cerveau de John Darnielle ? Depuis 2015, un catcheur pro, un adolescent aux allures de vampire goth et un mordu de jeu de rôle sur table lui ont chacun inspiré un album-concept. Le caractère hautement imprévisible de l’année en cours conduit cette fois le Californien et son groupe vers une lubie étalée sur la pochette mais cantonnée à la chanson-titre : les couteaux. Getting into Knives a été enregistré en une semaine dans le studio de Memphis où les Cramps avaient conçu leur premier album, Songs the Lord Taught Us (1980). Sous ce double signe, le dix-neuvième album des Mountain Goats ne cesse de batailler avec des idées noires pour faire jaillir la lumière.

LOMA – Don’t Shy Away
(SUB POP)

Emily Cross, accompagnée de Jonathan Meiburg (Shearwater) et Dan Duszynski (Cross Record) confirme, dans ce deuxième album pour Sub Pop après 2018, la puissance de son univers contemplatif. Naturaliste, peut-on ajouter en visualisant la pochette. 

MAGIK MARKERS – 2020
(DRAG CITY)

Routier de la scène noise dans les années 2010, Magic Markers poursuit une mue fascinante vers des espaces en apparence plus apaisés même si, à l’image de l’année 2020, qui donne son titre à l’album, la tension et les drames rôdent au coin de chaque note. Ce premier album en sept ans a quelque chose de fascinant, proche des équilibres fragiles de Bedhead ou d’un Low qui aurait renoncé aux sonorités électro et aux overdubs.

ELA MINUS – Acts of Rebellion
(DOMINO RECORDS)

La nouvelle signature de Domino Records est colombienne. La jeune Ela Minus – vingt-trois ans – est une artiste de son temps. Autonome, engagée, polyvalente et créative.

LULUC – Dreamboat
(SUN CHASER RECORDS)

Le troisième album de Luluc – les Australiens Zoë Randell and Steve Hassett, exilés à Brooklyn, où Aaron Dessner prend soin de leur son – paraît de façon quasiment autoproduite. Leurs folk songs prennent toujours le large, vers encore plus de lumière.

SOLARIS GREAT CONFUSION – Untried Ways
(MEDIAPOP RECORDS / KURONEKO)

C’est de l’americana grand classe, made in Strasbourg. Le deuxième album du projet de Stephan Nieser, entouré ici de six musiciens, prend racine sur un songwriting folk fasciné par les arrangements luxuriants de la pop sixties.


PLANTS AND ANIMALS – The Jungle
(SECRET CITY RECORDS)

Pilier du renouveau de la scène montréalaise depuis une vingtaine d’années, le trio formé par Nicolas Basque,Warren C. Spicer et Matthew Woodley ne prend la parole que lorsqu’il a quelque chose à dire puisque c’est “seulement” son cinquième album. Grand disque d’electro complexe et sous tension.

WOODS – Reflections Vol. 1
(WOODSISTS)

For fans only (mais on les sait ici nombreux). Coupé dans tous ses élans par le confinement et la crise sanitaire mondiale, Woods a décidé d’ouvrir ses archives et livre ici une sélection des débuts des travaux du groupe (2009-2013). Un lost album étrange et prolifique, comme ce qu’était Woods à cette époque avant de devenir l’auteur de grands albums. Le vinyle paraîtra en 2021.

Mais rien ne vous empêche d’écouter aussi les autres sorties du jour :
CHILLY GONZALES – Ivory Tower The Remixes (GENTLE THREAT LTD)
CHASSEUR – Crimson King (REPTILE / INOUÏE DISTRIBUTION)
BKTHERULA – Nirvana (WARNER)
LUCIDVOX – We Are (GLITTERBEAT / MODULOR)
JUNGLEPUSSY – JP4 (JAGJAGUWAR)
LIZZY YOUNG – Coocoo Banana (GFY)
SELFLESS ORCHESTRA – Great Barrier (STOCK RECORDS)
PALACE WINTER – Keep Dreaming, Buddy (TAMBOURHINOCEROS)
BETTER PERSON – Something to Lose (ARBUTUS / M&M REC.)
SEN MORIMOTO – Sen Morimoto (SOOPER RECORDS / MODULOR)
HAELOS – I’m There EP (AE RECORDINGS)



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