La bande d’Aquaserge et les trublions de Mostla (les compilations La Souterraine) ont marqué l’année écoulée de leurs disques aussi biscornus que poétiques. Ils ont emmené la pop francophone sur un terrain glissant mais sacrément excitant. Loin de la fixette années 80 de rigueur, ces gentils freaks intellos (mais pas casse-bonbons) revigorent un psychédélisme bigarré, l’aspergeant de chanson française déviante et de prog-rock exubérant. Julien Barbagallo, batteur d’Aquaserge, est aussi un musicien recherché (Tahiti 80, Tame Impala). Également auteur de charmants disques anglophones sous le nom de Lecube, Amor De Lonh (“amour lointain” en occitan) est sa première incursion dans la pop d’expression française. Édité en CD par Objet Disque, il en emprunte le titre au troubadour de langue d’Oc Jaufré Rudel. Pourtant, point de luths et de lyres ici, il souffle sur ces neuf chansons l’air frais d’un Brésil pop et bossa (À Côté De Toi). Léger sans être futile, Barbagallo évoque ainsi Marcos Valle (Ça, Tu Me). Ajoutez-y une pincée sunshine pop à la Mehdi Zannad (La Soif) voire un soupçon de Beatles époque Magical Mystery Tour (1967) sur le magnifique Tout Dire et ses airs de The Fool On The Hill. Enregistré sur un ordinateur en Australie entre deux tournées, il émane de cet ensemble à la guitare sèche et synthé bon marché une parenté avec le héros populaire de la ligne claire, Laurent Voulzy (La Réconciliation, Mourir Là-Bas). Amor De Lonh détient cette même nonchalance intelligente.
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5 novembre 2014