Le leader de J.C. Satàn a laissé de côté son groupe, du moins pour un temps, à la faveur d'une échappée solo remarquable. "So Far So Good" est sorti le 25 juin dernier chez Born Bad Records.
Arthur Satàn (Larregle à la ville), s’est échappé de sa formation garage punk J.C. Satàn pour faire honneur aux figures tutélaires de la pop, Beatles et Kinks en tête. Magic a interviewé ce touche-à-tout à la productivité aussi hallucinante que son don pour l’ubiquité artistique.
Arthur, tu es le leader du groupe garage punk J.C. Satàn (Sick of Love, Faraway Land). Tu viens de sortir ton premier album solo signé chez Born Bad Records : So Far So Good. Qu’est-ce qui t’a amené à tenter cette échappée en solo ?
Arthur Satàn : Je n’y ai pas vraiment réfléchi. Comme c’était pendant le confinement, je n’avais clairement pas grand-chose à faire. Et moi je suis toujours en train d’enregistrer des morceaux. Comme je n’avais pas de trucs de prévus ni avec Satan ni avec quoique ce soit, j’ai commencé à écrire des morceaux dans un style que je ne pouvais pas vraiment faire avant avec mon groupe. On faisait une pause. Après des trucs “bourrins”, de garage punk, je suis revenu un peu naturellement à mes fondamentaux d’enfant : de la pop et des classiques rock. Et c’est petit à petit que je me suis dit que je pourrais faire un album. Avant je sortais les titres et je les postais sur SoundCloud.
Je suis toujours en train d’enregistrer des morceaux.
Arthur Satàn
Peux-tu nous présenter cet album ?
Arthur Satàn : C’est un exercice de style involontaire sur les classiques de la musique qu’on a tendance à un peu oublier. Comme si maintenant on découvrait tant d’autres choses qu’on faisait plus attention aux Beatles, aux Kinks… On y est tellement habitué et c’est tellement de la grande musique qu’on perd presque l’habitude de les écouter, alors que ce sont quand même toujours les meilleurs groupes du monde. C’est aussi un exercice de style parce que ça finit par complètement répondre aux critères de ce genre de musique. Et en même temps ce n’était pas forcément voulu. C’est arrivé naturellement à force de remettre la tête dedans. J’ai tellement écouté ces disques… Par exemple, quand je ne découvre pas de nouvelles musiques ou de disques intéressants, je finis toujours par réécouter ce genre de musique. Je n’étais jamais allé aussi loin dans l’enregistrement dans d’autres groupes. Avant j’avais toujours les idées de ces morceaux, sans avoir jamais vraiment pratiqué l’enregistrement à ce point-là : d’arranger des pianos, des chœurs… J’écris presque mes morceaux dans ma tête.
Comment se déroule ton processus de composition ?
Arthur Satàn : C’est très naturel aussi. J’écris presque mes morceaux dans ma tête. Je peux être sous la douche, faire du vélo… A un moment je vais avoir une mélodie qui va arriver. Parfois ça peut être juste une mélodie de guitare ou un truc que j’imagine sonner au piano. J’entends presque déjà la production du morceau : parfois des arrangements. Dans ma tête, j’assemble les éléments. Et quand je me dis que ça a l’air cool une fois la chanson dans ma tête, je pars l’enregistrer, tout ça chez moi.
Comment vas-tu concilier ce projet solo avec ton groupe ?
Arthur Satàn : Je vais jouer pendant l’année avec mon projet solo. Et ensuite je pense que j’essaierai d’enregistrer un autre album de J.C. Satàn, peut-être le dernier parce qu’on en a déjà fait beaucoup [5 albums et 8 maxis ndlr]. On recommencera quand on aura un truc à sortir. Mon projet solo et mon groupe ne se chevauchent pas.Je voulais retrouver un peu l’audace des grands compositeurs des années 1960.
(Ci-dessous la playlist de ses influences réalisée par Arthur à l’invitation de FIP)
Avec J.C. Satàn, tu versais clairement dans le garage punk. Seul, ton travail est un hommage aux figures tutélaires de la pop ?
Arthur Satàn : C’était un peu une évidence, pas spécialement réfléchi et vraiment naturel. Je voulais surtout faire un super disque. Quand j’ai commencé à écouter les morceaux que je faisais, j’étais assez content de moi. Je me suis dit que ça valait peut-être le coup de faire un disque. Quand j’ai commencé à penser à un album, j’ai voulu faire un grand disque d’écriture ; sans prétention bien sûr, je voulais essayer de penser comme les mecs qui composaient avant. Ne pas se limiter dans l’ambition, dans les arrangements, dans l’écriture… C’est la tendance, quand on reprend les sixties aujourd’hui. On s’arrête un peu à quelques clichés, alors que c’est très riche. Et on finit par faire de la musique un peu plate si on s’arrête à ça. Je voulais retrouver un peu l’audace des grands compositeurs des années 1960. De là à y arriver, je ne sais pas, mais en tout cas c’est ce que j’avais envie de faire. C’est plus ça qu’un hommage. Je suis fasciné par ces gens qui osaient tout, qui n’avaient pas de limite dans les morceaux. Et c’est aussi ce qui a donné des choses incroyables.Quand on est conscient de ses influences, c’est qu’on est un peu en train de plagier.
On est frappé par les influences Beatles et Kinks. Quelles sont tes autres influences ?
Arthur Satàn : Pour moi ce n’est pas naturel d’être conscient de mes influences. Je ne pense pas trop comme ça. Quand on est conscient de ses influences, c’est qu’on est un peu en train de plagier. Si j’ai cité les Kinks et les Beatles, c’était pour donner une idée globale de l’esprit du projet. Je n’ai pas nécessairement pensé à des groupes quand j’ai travaillé sur l’album. Toutes mes influences sont inconscientes.
Tout ce que je peux faire c’est citer des groupes que j’aime. Mais je ne sais pas si une seule fois j’ai pensé à eux en écrivant ma musique. Quand on connaît vraiment ses influences, c’est peut-être qu’on n’est pas assez détaché.
Dans quelles circonstances as-tu signé chez Born Bad ? Tu chinais déjà quelques vinyles dans la boutique parisienne du label par le passé.
Arthur Satàn : Comme on a fait deux disques avec Jean-Baptiste Guillot [fondateur du label Born Bad Records ndlr], qu’on le connaît depuis longtemps et qu’il suivait J.C. Satàn depuis un bon moment… J’avais déjà eu des relations même sur des petits 45 tours il y a très longtemps. On a donc une bonne relation de confiance. Quand j’ai eu un disque à sortir, c’est le premier à qui j’ai demandé. Je n’y croyais pas trop parce qu’il a un petit problème avec les Beatles (rires).
Je pense qu’il me fait assez confiance. Il sait que je suis sérieux quand je fais des disques. Il a dit OK et on a eu vraiment deux mois et demi pour tout préparer. Il a calé la sortie entre deux trucs. On ne savait pas trop à quoi s’attendre. C’est cool parce qu’il a fait ça vite. Il n’a pas trop hésité. Personne ne regrette parce que c’est plutôt bien parti.
Il y a une époque où j’avais peut-être sept groupes.
Arthur Satàn
As-tu l’intention de mettre ton groupe entre parenthèses pour faire vivre cette aventure solo en live ?
Arthur Satàn : Je ne réfléchis pas trop de cette manière. Je vais bien voir comment ça arrive. Je suis vraiment la dernière personne qui prévoit des choses dans sa vie. Je bosse tout le temps à l’arrache. Je savais que je ferai un disque et ça s’est décidé en deux mois.
Là on va tourner avec ce groupe, ça c’est sûr. A priori il y a pas mal de dates qui vont arriver. On va jouer dans l’année. On fait des répét’. Je prends tellement de plaisir à faire la musique que si c’est possible, j’aimerais faire un deuxième album.
J.C. Satàn, ça nous manque aussi un peu. Je pense que je vais essayer d’écrire un dernier Satàn, et donc repartir en tournée, entre deux albums solo. Aujourd’hui j’ai aussi des plus petits groupes avec lesquels je vais sortir d’autres disques dans l’année. Quoiqu’il arrive je devrai apprendre à tourner et concilier le tout. C’est un truc qu’on a l’habitude de faire. On est plein à Bordeaux à jouer dans plein de trucs en même temps. Il y a une époque où j’avais peut-être sept groupes. Je jouais tout le temps. Il n’y a donc pas vraiment de parenthèse à faire, c’est plus de l’aménagement. Et personne n’est gêné que quelqu’un prenne le temps de faire un truc.
Dans le groupe de mon projet solo, je joue avec des musiciens de Satan. Il y a Romain Boutin, le batteur, et Gaspard Borne qui est à la basse. Notre ingé son Pascal Mondaz vient aussi avec nous.Peut-être qu’on aura plus la scène bordelaise sur place, mais Bordeaux va continuer à s’exporter. Plein de choses s’y passent encore.