Depuis plus de trente ans, et à un rythme stakhanoviste, sous son pseudonyme Bonnie 'Prince' Billy, l’Américain Will Oldham façonne une œuvre singulière, du dépouillement folk aux ballades country-rock profondément incarnées, seul ou souvent très bien entouré. "The Purple Bird", son nouvel album, s’inscrit dans la lignée de ses disques précédents (et surtout de ses meilleurs) tout en apportant une touche d’originalité : né d’une série de sessions d’écriture à Nashville avec son ami le producteur David Ferguson et quelques musiciens locaux, il capture des moments de spontanéité rares. Country plutôt traditionnelle, bluegrass modernisé, romances orchestrales et morceaux aux potentiels émotionnels toujours aussi puissants, la musique de Will Oldham se bonifie avec l’âge et traverse les époques troubles avec assurance et éclat.
Tu ne fais pas de promo pour tous tes albums. Tu as expliqué par le passé que c’était parce que tu n’étais pas à l’aise pour parler de tes disques ou que c’était parfois trop tôt après leurs enregistrements. Qu’est-ce qui est différent avec ce nouvel album, The Purple Bird ?
Will Oldham : Je ne sais pas, c'est plus facile pour cet album. Toute la genèse de l’album a été une surprise, il y a eu tellement de moments plaisants. Quand tu travailles très dur sur quelque chose, que tu planifies, planifies, planifies encore, il est difficile de prendre du recul sur ce que tu fais, tellement ton esprit est occupé à le faire justement. Pour cet album, ça n’a pas été le cas, il s’est fait sans que je m’en aperçoive vraiment. Mon esprit était plutôt léger et je me disais : "Eh bien, qu'est-ce qu'on est en train de faire ? Qu'est-ce qui se passe ?". J’observais autant que je participais. Et je trouve que cet album est amusant à écouter et qu’il est facile et presque relaxant d’en parler.
Es-tu plus fier de celui-ci que d’autres ?
Non, mais je dirais qu'il y a des aspects dont je suis particulièrement fier. Ce dont je suis le plus fier, je suppose, c'est la profondeur de la collaboration avec Ferg [NDLR : le producteur David Ferguson] qui a rendu tout cela possible. C'est ce qui lui donne son caractère. Et ça, j'en suis vraiment, vraiment fier. L’album est un vrai projet commun. Je suis aussi heureux d’entendre que je suis désormais capable de chanter parfois autrement, du moins que je l’étais pendant l’enregistrement. J’aime bien ce sentiment…
Travailler avec un producteur sur cet album t’a contraint à une certaine discipline ou des concessions ?
Non, non. Dans notre relation, on fait ce que Ferg veut faire, ça a toujours été comme ça ! Cette fois, il m'a juste dit où il voulait enregistrer et j'ai adoré l'idée. Je connaissais l'endroit, je connaissais sa relation avec cet endroit. Il ne me demande jamais de faire des choses que je ne veux pas faire, mais il définit ce que nous allons faire, sans plan préalable. Il découvrait au fur et à mesure quelles étaient les possibilités et les opportunités de collaborations. Et j'étais un bon client pour travailler de cette façon, parce que j'étais ouvert aussi et que je lui faisais confiance.