Quatre ans après un premier disque auquel elle ne prêtait pas sa voix, Lucie Antunes revient avec "Carnaval". Généreux, chamanique, exalté, l'album de la semaine de Magic du 14 avril 2023 libère ses énergies tout en voix et en tintements.
La compositrice Lucie Antunes donne un successeur tout en voix au tout instrumental Sergeï, son premier album paru en 2019. Là où il n’y avait que des chœurs, enregistrés par d’autres, sa voix s’impose ici, déborde de vie même, généreuse, exaltée. Une voix qui n’est pas tant trafiquée que ça d’ailleurs, moins qu’elle ne saurait l’admettre d’ailleurs. Une voix qui s’exprime aussi beaucoup dans le souffle, les respirations, les halètements, qui résument bien l’époque, suffocante, qui a d’ailleurs joué le rôle de détonateur pour cet album Carnaval. Une voix qu’elle utilise comme un instrument. La formule est largement galvaudée mais n’aura jamais autant fait sens que sur ce disque, tant sa voix s’ajoute à sa palette d’instruments percussifs. Son chant est guttural à la manière d’un tom basse, céleste à la manière d’une caisse claire. Les mots cognent, tapent fort. «J’ai voulu à la Meredith Monk aller au bout de ce qu’on peut faire avec la voix, utiliser la respire comme un élément rythmique, ce qui donne des sons ultra chelous que moi j’adore», dit la musicienne. Celle chez qui on situait la préférence vers des choses désincarnées est en fait assez familière de la musique vocale. «J’en écoute beaucoup, affirme-t-elle. Meredith Monk à fond, pas mal de chants grégoriens, des polyphonies, les chorales de Bach, dont les Passions qu’il a pu faire, saint Jean, saint Matthieu, et pas mal d’artistes pop aussi.»