Coralie Clément – La Belle Affaire

(Naïve)

“Voulez-vous faire un tour ?” On croirait entendre une invitation… À dire vrai, venant de la voix de Coralie Clément, même un mot assassin en serait une. La Belle Affaire est une création pareille à une porte que l’on peine à ouvrir. Il faut la secouer, cette porte pleine de larmes. Une fois le seuil franchi, on tombe sur une chambre avec vue. Une vue sentimentale, même si le mot semble léger pour désigner la mélancolie de ce disque, sa profonde tristesse.

Mais c’est une tristesse qui goûte peu à la résignation. Baisers volés, étreintes et regrets, voilà un album “truffaldien” à souhait. La Belle Affaire est le quatrième LP de la chanteuse, mais le premier enregistré sans son frère Benjamin Biolay (qui signe uniquement une composition et aucune production). L’iris bleu gris de Coralie Clément nous aimante vers ses douces complaintes. Gainsbourg et Jean-Claude Vannier en délicats promeneurs viennent arpenter certains titres – le frère absent hante les compositions. Promenade musicale où rien ne reste et tout renaît. Superbement arrangé et réalisé par Thomas Cœuriot, La Belle Affaire est un crève-cœur à rebours. À l’instar du fameux album de Daniel Darc, l’humilité et la pudeur servent les chansons comme jamais.

Entêtant comme une rupture, le LP ne cesse de visiter le même et unique quartier, le même boulevard, la même impasse. Fragile et pénétrante, la musique fait son cinéma comme Sur Mes Yeux, rengaine rappelant In The Death Car dans Arizona Dream (1993), le film de Kusturica. La Belle Affaire est le bel horizon des histoires anciennes, des chansons d’amour comme les imagine Christophe Honoré. Vraiment, lorsqu’on entend Tes Nuits Pâles, on se prend à chantonner : “Tu es belle, vue de l’extérieur.” Mais pas seulement, car le plus fascinant est bien la sublime introspection de cette œuvre qui tient toutes ses promesses.

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