“Ma chambre en avait marre de moi.” C’est ainsi que Tim Presley, le zigue derrière White Fence, présente son nouveau disque qui, pour la première fois, n’a pas été enregistré dans son appartement. En effet, depuis 2010, le guitariste de San Francisco tricote en catimini des chansons étranges qui chuchotent un psychédélisme aussi angoissé que lumineux. Du magique premier essai White Fence (2010) au vertigineux double LP Family Perfume (2012), il a réussi à imposer une musique pop déviante dont le décryptage devenait de plus en plus exigeant. Au point d’être presque illisible sur Cyclops Reap (2013), où Tim Presley semblait saboter délibérément ses chansons sous des aplats d’arrangements désincarnés.
Probablement aussi étouffé que nous par des mélodies qui ne respiraient plus, il a donc changé d’air pour aller à Los Angeles travailler avec son ami Ty Segall, où ce dernier s’est aménagé un studio. En résulte un album qui renoue avec un Tim Presley au meilleur de sa forme. Entre titres pop éblouissants (Sandra (When The Earth Dies), Goodbye Law, Raven On White Cadillac) et purs moments de rock’n’roll fougueux (Arrow Man, Paranoid Bait), voire les deux sur l’incroyable Wolf Gets Red Faced, le disque dégage une fraîcheur vivifiante, s’essayant même au boogie (Like That) et au folk (Hard Water). Si Ty Segall l’a poussé à clarifier son propos à l’aide d’une production sur mesure, Tim n’a pas essayé pour autant de contenir ses chansons fuyantes, dont la beauté confuse est redevenue une source d’envoûtement.