Le duo formé par Andrew VanWyngarden et Ben Goldwasser revisite avec un plaisir apparent ses influences new wave des années 1980. Mais, sur son quatrième album “Little Dark Age” à paraître vendredi, perd peut-être en exigence ce qu’il gagne en spontanéité.
Dix ans après son premier album, MGMT sait encore faire parler la fougue. On retrouve un peu, dans ce Little Dark Age, de la candeur d’Oracular Spectacular, l’album inaugural du duo brooklynois (2007) ; celle qui a fait le charme et la renommée de sa pop portée par la voix de tête d’Andrew VanWyngarden, chanteur à la gueule d’ange, et les bidouillages électroniques de son geek d’acolyte, Ben Goldwasser.
Cette fraîcheur, que les fans avaient peut-être eu plus de mal à retrouver dans l’auto-titré MGMT, en 2013, doit pour beaucoup à la nouvelle esthétique mise à l’honneur dans Little Dark Age, qui revisite avec gourmandise les années 1980 des Cure et autres formations new-wave.
L’album commence par une poignée de petits tubes dont sont tirés deux des trois singles parus jusqu’à présent (Little Dark Age et When You Die). Plus encore que par leur songwriting, finalement assez classique en comparaison des arabesques rock de Congratulations (le meilleur album du duo, sorti en 2010), ces quelques morceaux profitent d’une production baroque, ingénieuse et truffée de bonnes idées, aux synthétiseurs vrombissants et aux voix gonflées de réverbe.
La jeunesse renouvelée de MGMT passe aussi sans doute par le rapport plus décomplexé qu’entretiennent désormais ces deux-là à leur savoir-faire pop, eux qui avaient un temps refusé de s’adonner aux singles après le succès planétaire de l’hymne adolescent Kids. Il n’est pas rare d’entendre, au cours de Little Dark Age, des lignes très simples de synthétiseurs (Me and Michael, One Thing Left To Try) que semblait s’interdire le groupe depuis des années.
MGMT a peut-être cependant perdu en exigence ce qu’il a gagné en spontanéité. Little Dark Age recèle peu de mauvaises chansons parmi ses dix morceaux. Mais trop d’entre eux relèvent davantage de l’exercice de style que du geste novateur (TSLAMP), malgré la présence de ce que le milieu pop fait de plus branché et de talentueux, d’Ariel Pink à Connan Mockasin en passant par les producteurs Dave Fridmann et Patrick Wimberly, par ailleurs moitié du duo Chairlift.
La malice est probablement ce qu’il faut retenir de Little Dark Age. Le groupe joue de son érudition (dans le clip de son premier single, Andrew VanWyngarden apparaît grimé en Robert Smith). Retenons aussi le plaisir contagieux, sans doute, qu’en tire l’auditeur et le talent, c’est certain, dont sont pétris ces deux âmes insaisissables. Elles complètent, mine de rien, avec ce nouvel album, l’une des discographies pop les plus étonnantes des dix dernières années.
Robin Korda