Comme souvent, il ne fallait pas arriver trop tard pour être là où ça se passe, au Pitchfork Festival 2018. Les concerts qui nous ont transportés n’étaient pas forcément ceux des têtes d’affiche. Car Seat Headrest, libéré de sa guitare, a notamment livré le moment le plus rock’n’roll des trois jours à la Grande Halle de la Villette.
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CAR SEAT HEADREST
Le thrilling moment du Festival. On s’attendait à se régaler avec Will Toledo et sa troupe, mais celle-ci a pris du volume, et donne désormais une ampleur sans précédent à la musique de Car Seat Headrest. Débarrassé de sa guitare, à la tête d’un groupe de sept personnes où deux batteurs/percussionnistes confèrent une assise rythmique folle à son rock énergique, Will Toledo donne désormais libre cours à sa voix, à son corps, à ses allures de dandy accablé par son époque mais toujours en lutte.
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2. STEPHEN MALMUS AND THE JICKS
L’ancien leader de Pavement, sous une toise argentée qui trahit son expérience, reste un jeune homme joueur, énergique, doté d’une classe folle. Ses Jicks ne sont que trois pour l’accompagner mais c’est une mécanique de précision. Excellent guitariste, chanteur sous-estimé, leader d’une sereine autorité, Malkmus était aussi à l’aise une pinte à la main parmi les festivaliers après son spectacle. Rien à dire.
3. ÉTIENNE DAHO
Le patron a assuré tranquillement sa tête d’affiche du jeudi soir. Rôdé par cinq mois de tournée, Étienne Daho a paradoxalement offert un set d’un grande fraîcheur, marqué notamment par une reprise réussie d’Arnold Layne de Pink Floyd et une entrée en scène… avec masque à la Zorro. Le Blitz Tour s’achève bientôt à l’Olympia.
4. JOHN MAUS
C’était un plaisir de le revoir, lui qui avait dû renoncer à la Route du Rock et à la majeure partie des dates de l’été suite au décès de son frère. John Maus était bien là jeudi soir, pour un set d’une intensité et d’une impudeur d’une grande rareté. Perclus d’émotions qui dessinent un tenace mal-être, l’Américain a hurlé entre chaque strophe, bougé son corps comme s’il était possédé, harangué la foule avec rage. Seul avec ses machines pour l’accompagner. Saisissant.
5. DREAM WIFE
A l’heure de l’apéro, les trois punkettes de Dream Wife ont électrifié, vendredi, une Grande Halle encore en phase de chauffe, avec un rock d’une énergie constante et une attitude sans complexe. A 18 ans, on n’a pas encore envie d’introduire une grande diversité dans ses textures, mais c’est déjà pardonné.
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6. UNKNOWN MORTAL ORCHESTRA
OK, Ruban Nielson est énervant. Il a écrit des chansons parmi les plus prodigieuses de la décennie (From the Sun, Necessary Evil). Il les exécute avec une énergie désormais ahurissante – la force de l’habitude – même si la plupart commencent à dater. Excellent guitariste, le Néo-Zélandais se perd pourtant dans des solos interminables qui banalisent son talent et aident à comprendre pourquoi son songwriting se dissout au fil des albums. Perdu dans la foule et dans la fosse, il a été pardonné. Cette fois.
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Texte et photos : CÉDRIC ROUQUETTE