Durant ce confinement, les journalistes de Magic vous présentent leur cheminement musical au travers d’une playlist de cinquante morceaux triés sur le volet, accompagnée d’un texte de leur composition. C’est au tour du critique en herbe Jules Vandale de vous introduire dans son parcours musical.
Mon intérêt pour la musique et ma personne ont une chose en commun : nous sommes jeunes. Je suis né en 1997. Pendant la majeure partie de mon enfance et adolescence, mon appétit pour cet art fut pour ainsi dire presque inexistant. Je viens en effet d’une famille peu portée sur la culture, d’une ville bretonne (Lorient) peu portée sur la culture, et mes amis d’école étaient eux aussi, vous l’aurez sans doute deviné, peu portés sur la culture.
Mais, à l’été 2014, je tombe sur L’Album de la Semaine, sur Canal+. Ainsi que sur les quatre jeunes Californiens de FIDLAR, acronyme de leur cri de guerre “fuck it dog, life’s a risk”. Une première claque qui en appellera d’autres. No Waves, coup de gueule déjanté sur les cures de désintoxication que Zack Carper ne connaît que trop bien, deviendra mon “hymne”. Le quartette m’entraîne alors dans cette scène garage-punk, Together Pangea, Skeggs ou Hockey Dad accompagnant mes longs après-midis au skatepark du coin. Durant l’été 2015, “J’expérimente” la scène brooklynoise et complète mon apprentissage à coup de Beach Fossils, Craft Spells et DIIV. Mon entrée en fac de droit à Vannes, plus morne encore que Lorient, fait tanguer mon moral. Un terreau propice à l’entrée dans ma vie de Beach House, rapidement essentiel.
Vient alors mon premier concert, et ma première venue à Paris, en mars 2016, pour revenir à un amour de jeunesse : Together Pangea au Batofar, avant que l’emblématique péniche ne devienne un club de salsa. Je l’ignorais encore, mais la rencontre, ce soir-là, de deux futures amies allait changer ma vie. Pour le meilleur.
Parce qu’à l’Ouest, rien de nouveau, mis à part mon intérêt pour la musique remplaçant celui pour le droit administratif. Je découvre la foisonnante bedroom pop, que je passe une partie de l’été 2017 à “digger” sur Spotify et YouTube, génération Z oblige. Mon quotidien sera alors rythmé par Vansire, Castlebeat ou bien encore Orchid Mantis. Arrive une date charnière, le 29 mai 2017. J’y passe le cap de la double décennie devant un concert de Skegss à l’Espace B, et j’y prends une décision riche de conséquences : je veux un métier en lien avec la musique. Sentant que je n’ai plus d’avenir en droit, je demande conseil à une de ces amies rencontrées un an plus tôt, étudiante en médiation culturelle. C’est en mars 2018 que je quitte définitivement la fac, direction Paris et l’IESA, où j’ai été accepté… En fait non, les cours ne commencent qu’en octobre. Je participe donc à l’effort de guerre en bossant six mois en usine, six mois pendant lesquels mes goûts musicaux n’évoluent paradoxalement que peu, mais au bout desquels je vais prendre une nouvelle décision riche de conséquences : mon envie de parler de musique devenant difficile à assouvir, j’écris au mois d’août 2018 mon premier article, centré sur la synth pop romantique de Muddy Monk et publié sur mon blog Indé3Soleils. Mon arrivée dans la capitale va considérablement me faire évoluer. Enchaînant les concerts et les rencontres, je vais devenir la “mascotte” de la scène indépendante parisienne et me lie d’amitié avec la team Buddy Records. Indé3Soleils se focalise alors sur la riche scène de notre pays, comme TH Da Freak, En Attendant Ana, Lesneu, Bryan’s Magic Tears ou Marble Arch. Au même moment, ma première chronique est publiée dans les pages de ce beau magazine qu’est Magic, dans le numéro 213 : Second, de Beach Youth, “Fossiles de plage” caennais.
Quelques mois plus tard, pris d’un amour aussi récent qu’intense pour le shoegaze, j’y signe mon premier article sur ce genre qui occupe encore aujourd’hui 50 % de mon temps d’écoute. Avec une appétence particulière pour des groupes japonais tels Pasteboard ou Cattle, aux murs de sons aussi traditionnels que futuristes, belle métaphore du pays du soleil levant. Fin 2019, je bascule (tardivement, mais sûrement) dans le monde merveilleux de l’indie pop goût sauce Worcestershire. Sarah Records m’enchante et mes playlists commencent petit à petit à grouiller de petits groupes de post-twee pop aux noms improbables (tels que Math and Physics Club ou Afternoon Naps). Mon voyage musical est encore long, mais j’ai tout le temps devant moi. Je suis encore jeune, non ?