Mogwai – Rave Tapes

Si les étiquettes n’ont jamais vraiment signifié grand-chose, celle de “post-rock” est particulièrement dérisoire. Surtout si l’on s’obstine à considérer Mogwai comme un pilier du genre. À ses débuts, en tissant ses arpèges à rallonge et à tiroirs, le groupe courait derrière les spectres de Codeine et Slint. Aujourd’hui, à l’écoute des derniers disques ainsi que d’élégantes bandes-son composées pour le cinéma (Zidane, A 21st Century Portrait, 2006) ou la télévision (Les Revenants, 2013), le quintette écossais fait plutôt jeu égal avec Air et Talk Talk. Comme si transfigurer la pop à guitares ne lui suffisait pas, Mogwai a aussi semé plusieurs graines en terres heavy metal – c’est ainsi qu’Isis, Cult Of Luna et Torche ne tarissent pas d’éloges à son endroit. Malgré cet arbre généalogique musical bigarré (auquel on pourrait encore greffer d’innombrables branches), sa discographie demeure cohérente et nuancée. Rave Tapes est le point d’orgue de toutes ces sonorités.

Un disque de rock moderne, lourd sans jamais être agressif, mâtiné d’une électronique délicieusement désuète. Un LP qui synthétise le meilleur de la bande. Après l’envoûtante musique des Revenants, hypnotique et délicate, certains craignaient un retour aux compositions libres toutes guitares dehors. Il faut dire que les Écossais s’égaraient parfois dans leurs propres dédales soniques, on pense à la distance froide de The Hawk Is Howling (2008) ou à la rigidité de Hardcore Will Never Die, But You Will (2011). Cette fois, Mogwai tape dans le mille d’un bout à l’autre. De la pop shoegaze (Blues Hour) au rock électronique élégiaque (Remurdered) en passant par une suite de riffs puissants (Hexon Bogon), il frappe fort et juste à chaque fois. Rave Tapes est un album généreux sur le plan sonore, très construit et à l’enthousiasme contagieux. Jusqu’alors, on admirait Mogwai pour sa capacité à se renouveler au fil des disques, étoffer son univers sonore ou nuancer les émotions. Aujourd’hui, on loue ses talents de compositeur (qu’on comparera sans hésiter à Boards Of Canada ou Fugazi) et sa capacité à fasciner l’auditeur dès les premières secondes.

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