© Jules Vandale

Slowdive, Backxwash ou encore bar italia – voici nos coups de coeur de la Route du Rock 2024

De la pluie, du camping, de l’alcool, des copains, des belles photos et surtout des bons groupes – cette cuvée 2024 de la Route du Rock a regroupé tout ce dont on raffole dans l’esprit du festival malouin. Petite plongée dans nos six concerts favoris de ce week-end prolongé.

JEUDI 15

Slowdive

Regarder le show Slowdive depuis l’espace VIP – et accessoirement faire du karaoké sur la moitié du set avec un ami croisé sur place – restera un de mes souvenirs marquants de la Route du Rock 2024. Devant un public intergénérationnel – des ados aux sexagénaires –, Slowdive a immédiatement charmé l’assistance, dix ans après leur reformation, là-aussi au Fort Saint-Père. Il faut dire que leur shoegaze n’a pas pris une ride même au bout de trente ans, bande-son des ados déprimés d’hier et d’aujourd’hui par excellence. De Catch The Breeze à Kisses, de When The Sun Hits (de loin le hit de Slowdive qui bénéficie le plus de l’effet «seconde jeunesse» du groupe) à Chained To A Cloud, et évidemment avec Alison (point culminant du karaoké susnommé) et Souvlaki Space Station, on ressort de là bouche bée, oreilles comblées et yeux ébahis par la qualité des éclairages scéniques. Un grand moment, assurément. Et le véritable lancement du festival à mes yeux. 

Backxwash 

Quand je vais en festival et que je ne connais pas un artiste de la programmation, je préfère garder la surprise intacte jusqu’au début du set. Backxwash, ça ne me disait rien, mais je me doutais que ça allait «envoyer du bois», comme dirait mon père – du moins, c’est ce que semblaient annoncer ces messages de prévention à l’épilepsie projetés sur le fond de la scène des Remparts. Backxwash, alias d’Ashanti Mutinta – rappeuse et productrice zambo-québécoise – se pointe à minuit quinze sur scène. Et très vite, on comprend les avertissements précédemment évoqués. Devant un écran diffusant quantité d’images cauchemardesques, le visage grimé par un maquillage d’ailes de corbeau, croix christique entre les deux yeux, Backxwash fait, avec son timbre grave, exploser son horrorcore queer hybridée au metal industriel. Mention spéciale à ce I LIE HERE BURIED WITH MY RINGS AND MY DRESSES aux refrains screamo Korn-esques, ou à ce DEVIL IN A MOSHPIT bien senti pour plonger dans le public. La belle découverte d’un festival qui aura compris que rien ne sert de rester dans sa seule chapelle. 

VENDREDI 16 

bar italia  

Le groupe numéro 1 de l’année 2023 selon Magic ne pouvait évidemment pas ne pas figurer dans ce classement de nos concerts favoris de cette Route du Rock 2024. Prenant place à 19h20, en plein coeur du déluge ayant un peu «gâché» cette deuxième journée de festival, Jezmi Tarik Fehmi, Nina Cristante et Sam Fenton ont en tout cas prouvé que la pluie leur allait si bien. bar italia a pris du galon, c’est certain, et leur présence scénique bien plus marquante que lors des premiers concerts de la bande ne laisse désormais plus indifférent – mention spéciale à Nina qui a dû prendre l’option «derviche tourneur» lors des résidences effectuées par le trio. Prise dans le contexte «festival», la setlist est impeccable – entrée sur rage quit, piste issue de Bedhead (2020), puis enchaînement des meilleurs morceaux parus sur The Twits et Tracey Denim, avant de clôturer le set par Polly Armour suivi d’un Worlds Greatest Emoter plus rock que jamais. Il ne manquait qu’un Glory Hunter pour complètement me subjuguer. Le groupe le plus londonien du moment, assurément. 

Fat Dog

Nouveaux diamants-brutes de la couronne Britannique, Fat Dog a montré au public de la Route du Rock en quoi ils étaient un groupe sacrément poilant à voir en live. Joe Love, frontman dont le jogging de pimp et la chapka amplifient sa posture aux allures de gourou, c’est déjà pas mal. Que dire alors du claviériste qui, dès le second morceau, fini par se jeter dans la boue du Fort Saint-Père pour s’en mettre plein le visage façon Martin Sheen dans Apocalypse Now, avant de mimer des prises de kung-fu dans le vide ou de se prendre pour un crieur public du Moyen-Âge au moment d’introduire certains morceaux ? Entre aperçus de WOOF,  album à paraître le 6 septembre prochain, quelques inédits et… une reprise de Satisfaction de Benny Benassi, la formation crank-wave / baggy a en tout cas offert un grand moment aux curieux noctambules, transformant le temps d’un set de quarante-cinq minutes la pataugeoire de la scène des Remparts en rave-party. On en redemande. 

SAMEDI 17 

Air

Autant être honnête avec vous tout de suite : à part la B.O de Virgin Suicides, je n’ai jamais vraiment écouté Air de ma vie, juste assez pour pouvoir dire que je connais. Voilà, c’est dit. Mais l’idée de voir le duo français – enfin, trio pour l’occasion, car accompagné par un batteur – jouer Moon Safari, album culte s’il en est, dans une étrange… «boîte» scénique, ça me tentait quand même pas mal. Point culminant de la dernière soirée de la Route du Rock, Air nous a offert un show remarquable, prouvant – comme s’ils en avaient vraiment besoin – que les versaillais étaient bien les princes de la French Touch. Au programme, Moon Safari, effectivement, dans son intégralité, mais aussi quelques – j’imagine – incontournables, comme un Playground Love de toute beauté. De toute beauté, comme ces lumières sublimant le dispositif scénique précédemment évoqué ainsi que l’élégance naturelle de Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin. Comme écouter le disque chez soi, en cent fois mieux. 

Protomartyr 

Passer de la grâce de Air à la rage de Protomartyr, ça mérite de se mouiller un peu la nuque. Un show qui commence dès l’entrée toute en flegme du frontman ​​Joe Casey, gueule autoritaire en costard, clope dans la main, bière dans l’autre, canette dans la poche parce qu’on sait jamais. Habitué du Fort Saint Père, où c’est leur troisième venue, Protomartyr peut se voir comme une personnification de l’expression «l’habit ne fait pas le moine». Sous son allure tranquille, presque nonchalante,  la formation basée à Detroit délivre comme à son habitude un post-punk tempétueux et noisy, aux guitares plus que tranchantes et à la voix sépulcrale, piochant dans les six albums que le groupe a sorti depuis ses débuts en 2008. Peut-être le concert le plus bruyant de cette édition 2024. 

© Jules Vandale