Le geste est flamboyant et distingue encore un peu plus Coming Soon de ses confrères hexagonaux. Parfums de synthèse, énergie galvanisante, Tiger Meets Lion est un album pop au sens plein du terme : efficace et gonflé mais aussi diablement ambitieux. Il photographie le groupe à la confluence de deux cheminements. Il y a d’abord les projets menés séparément par ses différents membres. Mount Analogue, The Pirouettes, The Lobster Boat ou ArKaDin ont permis à chacun d’explorer d’autres propositions musicales et d’affiner ce qu’il voulait injecter dans Coming Soon. Il y a ensuite ce qui est passé entre les oreilles de la bande et notamment cette frange la plus avancée du R&B contemporain, celle qui allie sans complexe mélodies attrape-tout et expérimentations sonores. Le tout mûri au fil d’années denses, résumées avec humour par Howard Hughes : “Cette évolution peut paraître comme un tournant à 180 degrés par rapport à nos premiers albums mais il y a eu trois ans de travail, soit trente-six mois : ça fait un peu moins de cinq degrés par mois, c’est donc une évolution assez tranquille pour nous.”
Mais pour l’auditeur qui a peut-être dormi sur les souvenirs de l’indie folk et du rock d’autrefois, la surprise risque d’être de taille. Elle sera bonne et libératrice car on peut chanter et danser sur la plupart de ces chansons nourries aux synthétiseurs et séquenceurs et portées par une section rythmique implacable. The Night Stephanie Died et Lookaway rebootent les années 80, LWL s’essaie crânement à l’autotune quand le single Vermilion Sands croise une énergie très rock’n’roll (ces chœurs !) et des orchestrations hybrides. Car c’est bien là que réside le secret de Tiger Meets Lion, dans cette greffe parfaitement maîtrisée entre les racines de Coming Soon et ces boutures synthétiques, qui doit beaucoup à la collaboration avec le producteur Scott Colburn (Arcade Fire, Animal Collective). Le processus d’enregistrement en dit long sur les ambitions soniques de Coming Soon – une première session de quinze jours de prises live suivie de dix jours entièrement dédiés à l’expérimentation sur les sons. Appliquée à leurs envolées pop ou à des chansons plus classiques et aussi belles que Goldeneye et Radio Broke (duo avec Cassie Berman, madame Silver Jews) et, la formule produit des étincelles en pagaille. Un feu d’artifice.